Les deux protagonistes de notre comparatif nous reviennent un an après leur présentation, équipés de l'ABS. Un «plus» incontournable pour ce genre de machines, même si leurs constructeurs respectifs positionnent clairement ces deux scooters sur un créneau plus sportif qu'utilitaire.
Deux poids lourds s'affrontent aujourd'hui sur le ring de Bruxelles et de Moto 80. Yamaha et Kymco peuvent tous deux s'enorgueillir d'une belle légitimité dans le secteur du scooter. On ne présente plus la marque aux trois diapasons, bien connue pour nombre de motos mythiques, mais aussi pour avoir révolutionné le monde du scooter avec le Tmax, présenté en 2001, et toujours en haut de l'affiche treize ans plus tard! Kymco de son côté n'a guère à rougir. Fondée en 1963, la firme basée à Taiwan a d'abord produit des pièces pour le géant Honda, avant de lancer son premier scooter en 1970. Disposant aujourd'hui d'une gamme de scooters s'étendant du 50 au 700cc, Kymco a su séduire des firmes comme BMW, pour laquelle le Taïwanais a produit les moteurs de la G450X d'enduro et fournit encore les moteurs des scooters C600 et C650, ou Kawasaki, qui a pris comme base de son J300 un scooter Kymco! C'est donc sans états d'âme que Kymco s'attaque maintenant aux cadors du marché.
Revenons à Yamaha, qui ne craint pas grand monde avec son Tmax, et qui a fait un malheur avec ses Xmax 125 et 250. Entre les Xmax et le Tmax pourtant, un véritable gouffre que Yamaha n'a longtemps comblé qu'avec le Majesty 400, un bon bougre, plus dans l'esprit d'un Suzuki Burgman ou d'un Honda SilverWing que de la famille «Max». Plus GT que sportifs, ces scooters «mid-size» bourgeois semblent aujourd'hui complètement passés de mode, au point qu'ils ont tout simplement disparu des concessions. Pour combler ce vide, la recette relativement simple imaginée par Yamaha a consisté à greffer le moteur du Majesty dans une silhouette inspirée du Xmax. Inspirée seulement, car le cadre des «petits» Xmax aurait eu bien du mal à contenir les prestations du bloc 400.
Le design
Dynamiques et soignées, les lignes du Xmax 400 mixent avec un certain talent le style des Xmax 125 et 250 avec celui du Tmax: on retrouve ainsi les fameux «boomerangs» s'étirant sur les flancs. Mais le dernier-né de chez Yamaha trouve dans le récent XCiting un compétiteur de poids. Ne reprenant du XCiting 500 que le nom et quelques traits, le 400i séduit d'emblée. Racé, sportif, joliment dessiné, avec une poupe autrement plus légère que celle du Xmax qui s'encombre d'une boîte à air de chaque côté et d'un échappement particulièrement proéminent, au point qu'on aurait peur de l'accrocher en remontant les files, le XCiting remporte notre adhésion en statique.
Un examen plus détaillé relèvera le splendide feu arrière à LEDs contre lequel celui du Xmax, pourtant réussi, ne peut rien. Même constat à l'avant, avec un regard et des LEDs plus travaillés chez Kymco. Le Xmax en possède aussi mais, positionnés plus discrètement, ils en imposent moins dans les rétroviseurs des voitures qui précèdent. Pareil pour les phares: si nos deux scooters possèdent chacun deux optiques séparées, Yamaha a choisi, comme pour le Tmax, d'en destiner un au feu de croisement, l'autre au feu de route. Résultat, un regard «borgne», contrairement au Kymco dont les deux optiques sont allumées en permanence.
La revue de détails continue, toujours en faveur du XCiting: les roues aux fins doubles bâtons, les disques «pétales», les étriers à fixation radiale, les rétroviseurs à double branche, les repose-pieds arrière plus finement intégrés et qui se déploient par pression sur un bouton, le lèche-roue arrière ou encore le frein de parking et l'accroche-sac.
Vous en voulez encore? En ouvrant les vide-poches et les compartiments sous la selle, le XCiting enfonce le clou avec un éclairage LED dans le coffre et une prise 12V (bien cachée!) dans le tablier avant, tandis que le commodo droit abrite un coupe-circuit, des équipements sur lesquels le Xmax fait bizarrement l'impasse. L'ouverture de selle n'est qu'une formalité sur le Kymco par la grâce de vérins hydrauliques. Pour le Xmax, une main au contacteur, l'autre pour soulever la selle… Le Xmax se rattrape avec un deuxième vide-poches dans le tablier, mais aussi un volume de chargement sous la selle plus vaste et pouvant contenir jusqu'à deux intégraux, suivant les modèles, alors que le XCiting n'en acceptera qu'un seul. Notons au passage que nos deux compères font l'impasse sur la moquette dans le coffre.
L'équipement
Le Xmax marque encore des points à l'examen statique avec un pare-brise plus protecteur et des coquilles derrière lesquelles les mains trouveront un semblant d'abri, alors que le Kymco ne propose rien de ce côté-là. Autre bonus pour le Yamaha, une clé codée, sans doute plus dissuasive que le volet antieffraction au contacteur du Kymco. Ceci dit, ce volet protégera certainement le barillet des intempéries. Celui du Yamaha avait déjà pas mal souffert des nettoyages à haute pression imposés aux machines de presse…
Le Xmax possède aussi quelques beaux détails, comme les poignées d'ouverture des deux rangements situés sur le tablier, dont l'un se verrouille à l'aide de la clé, ou la finition classieuse de la selle avec ses inserts en aluminium et ses surpiqûres plus soignées. Si le Kymco ne démérite pas, le Xmax marque pourtant encore des points par une finition d'un cran supérieure, nous n'en voulons pour exemple que le tableau de bord. Celui du Xmax s'inspire de celui du Tmax 530. Ses deux cadrans au contour pentagonal, rappelant les tristement célèbres échappement de feue la Suzuki B-King, restent à notre avis d'un goût discutable, mais se montrent autrement plus lisibles et flatteurs que le combiné monté sur le Kymco. Si tous deux possèdent un compte-tours, finalement peu utile sur un scooter, le XCiting se contente d'un petit affichage numérique de la vitesse, quand le Xmax dispose d'un cadran analogique plus lisible. On retrouve sur les deux un pavé digital, donnant chez Yamaha l'heure, la température extérieure, la température d'eau, la jauge à essence et les deux trips. Le Kymco fait l'impasse sur la température extérieure mais dispose d'un témoin d'utilisation de la prise 12V!
La vie à bord
Guère de surprises en prenant place à bord de nos deux machines. Les positions ne diffèrent pas réellement, mais tout de suite une différence saute aux yeux: la selle pourtant plus basse du Xmax ne s'amincit pas au niveau des cuisses. Résultat, on se trouve les jambes très écartées à l'arrêt et l'on peine à mettre pied à terre. Le Kymco possède une selle plus haute, mais elle s'amincit vers l'avant, ce qui la rend plus agréable au feu rouge. Restons au niveau de la selle pour constater que le moelleux offert par celle du taiwanais sera plus respectueux de votre fessier que celui prodigué par celle du japonais, décidément trop dure. Pas de problème sur les deux compères pour trouver à se loger sans se sentir à l'étroit, même si le tablier du Xmax semble plus proche. L'espace pour les pieds nous séduit plus sur le Kymco, laissant à ceux-ci plus de liberté que sur le Xmax avec sa découpe en Z.
Le passager privilégiera sans hésiter le Kymco. La selle, plus confortable, s'avère aussi bien plus logeable, mais surtout, les deux poignées de maintien se prolongent vers l'arrière pour se rejoindre derrière la selle, permettant à l'éventuel passager de prendre appui derrière lui lors des accélérations, mission impossible avec les poignées du Xmax, plus courtes que l'assise de celui-ci. Encore une petite remarque sur le béquillage: la centrale se déploie avec facilité sur les deux scooters, gage d'un poids contenu et d'une cinématique bien pensée. La béquille latérale du Kymco est plus facile à appréhender que celle du Xmax, dont le petit ergot ne dépasse guère.
Les performances
Au niveau des performances, la hiérarchie est respectée: le Kymco, plus puissant sur le papier, se montre légèrement plus vif en accélération et en vitesse, mais de peu. Ce ne sont donc pas les performances qui feront la différence, mais bien l'agrément, un domaine dans lequel le Kymco emportera l'adhésion avec un comportement plus onctueux et agréable à l'usage. Performant et volontaire, le Kymco prouve à suffisance qu'il n'est pas nécessaire de casser sa tirelire pour un coûteux maxiscooter. Avec une vitesse de pointe avoisinant les 155km/h réels et de franches reprises, il tire son épingle du jeu dans tous les cas de figure. Des brillantes prestations dont le Xmax n'est jamais éloigné.
Le comportement routier de nos deux compétiteurs ne marquera pas non plus de fortes différences. Si le Kymco se montre impérial de stabilité à un rythme élevé, avalant les courbes rapides comme vissé sur un rail, son train avant paraît pourtant plus lourd et le Xmax semble plus joueur pour se faufiler en ville. Peut-être une question de géométrie du cadre: l'angle de chasse du Kymco serait-il plus ouvert? Mais ici encore, ça se joue sur peu de chose. Plus gênant par contre, la garde au sol du Xmax, vraiment trop limitée du côté gauche par la béquille centrale. Il ne faut guère d'enthousiasme pour la racler sur le bitume, et si vous êtes en duo ou que le scooter amorce un pompage sur un mauvais revêtement en courbe, vous n'y échapperez pas. Prudence donc, car c'est le bon moyen pour s'offrir un billet de parterre! Pas de problème chez Kymco, la garde au sol généreuse permet toutes les excentricités.
L'heure du choix
Nous avons vu plus haut que le Kymco veillait avec plus d'attention à l'accueil du passager et libérait plus d'espace pour le conducteur. Le travail des suspensions confirme ces bonnes intentions face au Xmax. Celui-ci souffre de tarages «sportifs». Le comportement en sort gagnant, le fessier des occupants un peu moins. Notre pays souffre d'un réseau routier pitoyable, et nous aurions aimé un amortissement plus conciliant. Le Kymco s'en sort mieux, mais de peu, avec des suspensions à peine moins dures. Tous deux assument donc pleinement leur statut de scooters sportifs!
Grosse nouveauté du millésime 2014, nos deux larrons peuvent enfin bénéficier de l'ABS, une technologie indispensable sur ce genre d'engin utilitaire avant tout, malgré leurs prétentions sportives. Ici encore, difficile de les départager. L'équipement du Kymco en jette un «max» avec ses étriers radiaux à quatre pistons et ses disques «pétale», mais le Xmax ne se révèle pas moins performant pour autant. Nous aurions même tendance à reconnaître un poil plus de mordant au japonais, mais le Kymco compense avec ses poignées réglables qui se plieront à toutes les morphologies. Alors, sushis ou nouilles sautées? Tous les goûts sont dans la nature et vous pourrez tout autant pencher pour l'un que pour l'autre tant ces deux machines se valent. Un peu plus de capacité d'emport et de protection pour l'un, un moteur plus onctueux et un style plus actuel pour l'autre, mais un XCiting avec ABS pour le prix d'un Xmax sans ABS…
Des chiffres
A la toise, nos deux asiatiques jouent dans la même cour: même poids à quelques kilos près, empattements comparables, dimensions de pneus identiques. Le Kymco se démarque par des disques de plus grand diamètre à l'avant avec des pinces à quatre pistons, deux seulement pour le Yam qui se rattrape avec un réservoir de plus grande capacité, ce qui espacera les passages à la pompe.
Techniquement, tous deux sont mus par un monocylindre 400cc (395 pour le Yamaha, 399 pour le Kymco) injecté et refroidi par eau. Le bloc Yamaha produit par Minarelli nous est connu puisqu'il assurait la motorisation du défunt Majesty. Le Kymco s'équipe au contraire d'un tout nouveau bloc. Est-ce pour cette raison? Toujours est-il que les chiffres penchent en faveur du dernier-né: 36ch et 37,7Nm de couple, face aux 31,5ch et 33,9Nm du Minarelli.
Un comparatif signé Bruno Wouters et publié dans le Moto 80 n°767 d'octobre 2014.