Apparue fin 2010, la Kawasaki Z1000SX se montrait particulièrement ambitieuse. Son objectif: conférer un plaisir de conduire sans réserve au quotidien, en ville et sur route. Mise à l’épreuve.
Pour vérifier avec certitude si une moto procure du plaisir à son conducteur, quoi de mieux que de la tester dans des conditions peu idylliques. Des circonstances en tout cas moins glamour que celles habituellement rencontrées sous les douces latitudes du Sud, privilégiées par les constructeurs pour les essais presse. En clair: cette fois, lançons-nous pour un test bien rugueux sur nos routes défoncées de la province du Luxembourg. En plein hiver de surcroit. Brrr… Les températures flirtent avec le zéro et nous sommes chaudement habillés. Petite surprise au démarrage et, surtout, au premier freinage. Vu le froid de canard, l’injection «travaille» généreusement. Et le premier «Stop» sur la voie publique ne semble pas trop l’intéresser. Plus une surprise qu’une véritable alerte mais mieux vaut être prévenu…
Air de Z
Quelques rues de zoning industriel avalées et nous voici déjà sur le ring de Bruxelles, en direction de la E411. La prise en main est immédiate et l’on se sent de suite à l’aise au guidon, comme si nous avions déjà parcouru plusieurs milliers de kilomètres ensemble. Premier constat: la Z1000SX appartient à cette catégorie de motos que vous avez l’impression de connaître depuis toujours. Son design saura parler aux amateurs du style supersport, mariant subtilement les lignes des dernières ZXR et de la gamme Z. Le carénage intégral se veut typé supersport mais ses bords frontaux forment une sorte de bec d’attaque déviant l’air autour de la machine tandis que la bulle possède trois positions de réglage couvrant un angle total d’environ 20°. Deux éléments que l’on retrouve habituellement davantage sur des routières….
Du feu de dieu
Les bornes kilométriques défilent sur l’autoroute et l’ankylose ne guette toujours pas. Merci à la position de conduite relativement droite comparée à celle d’une supersport. En fait, elle se rapproche diablement de la position adoptée sur une Z1000. Mais en mieux et avec une protection quasi totale contre le vent ! Pas de pression sur les poignets donc ni sur les genoux qui trouvent aisément leur place sous les arêtes évasées du proéminent réservoir. Si vous mesurez aux alentours d’1,80m… la marque nippone assure que grâce au carénage s’évasant à l’arrière, l’air chaud du moteur se voit ainsi évacué loin des jambes du conducteur. Un confort certain mais à évaluer en été, parce qu’en plein hiver…
Qu’a t-elle dans le ventre cette Kawa? La réponse est sans équivoque: du répondant à tous les étages! Des plus bas régimes à la zone rouge, la Z1000SX pousse fort. Très fort. Même pas nécessaire de «retaper» une vitesse, la réponse des gaz est vive, sans à-coup et les vitesses légalement déraisonnables sont atteintes en moins de temps qu’il n’en faut pour l’écrire. La belle témoigne d’un caractère de feu qui ne demande qu’à s’exprimer. Jusqu’ici, nous avions découvert une routière déguisée. C’était en effet un leurre, elle n’est rien d’autre qu’une vraie-fausse sportive. Les réglages du moteur visent en réalité à intensifier les sensations du pilote à l’ouverture des gaz. Avec un accent particulièrement mis sur le couple. Celui-ci est en effet calculé au maximum possible avant que la roue arrière ne commence à patiner. En outre, le diamètre d’admission de 38mm a été étudié pour offrir une réponse idéale dans les basses et moyennes rotations.
Réaction
Dès les premiers lacets, gras et trompeurs en cette saison, la Z1000SX confirme son ADN sportif. Malgré un poids proche des 240kg tous pleins faits et avec ABS, la compacité de la machine rappelle les sensations que procure une supersport qui enfile les virolos. Cette efficacité, la Z1000SX la doit essentiellement à un recentrage des masses reposant sur le système d’échappement, l’amortisseur arrière unique horizontal et l’utilisation de corps d’injection inversés. Exemple: la suspension arrière place l’amortisseur et les biellettes au-dessus du bras oscillant. Léger et rigide, le cadre, qui se compose de cinq pièces en fonte d’aluminium, tire quant à lui bénéfice du moteur porteur et participe à la tenue de route. Soulignons encore le réglage progressif en compression et détente de la fourche inversée ainsi que le réglage de précontrainte des ressorts. De quoi assurer sportivité ou confort selon l’humeur du pilote.
En conclusion…
Docile en ville, fougueuse quand l’horizon se libère, la Kawasaki Z1000SX s’apparente à un caméléon. Elle conviendra autant au navetteur pressé qu’au supersportif désireux de soigner quelque peu son dos mais pas son cœur. Mi-ange, mi-démon mais à la hauteur de ses ambitions.
Un essai signé Laurent Cortvrindt et publié dans le Moto 80 n°737.