Encore près de 200 bornes pour cette dernière BBB de la saison mais on a pensé au froid qui arrive et aux jours qui raccourcissent avec un virée pas trop lointaine en province de Namur. Notre itinéraire en fait à peu près le tour, laissant de côté la vallée de la Semois…
À nos yeux, la province de Namur est – c'est un avis purement subjectif – si pas la plus belle, du moins la plus attirante des provinces wallonnes. Des étendues limoneuses de Hesbaye aux forêts ardennaises, en passant par l'Entre-Sambre-et-Meuse, la Famenne et le Condroz, il y en a pour tous les goûts. Le rendez-vous était fixé à Eghezée, gros village «carrefour», facilement accessible par la sortie n°12 de l'E411 Bruxelles-Namur. Vastes plaines à perte de vue plantées de céréales ou de betteraves, la région d'Eghezée propose des paysages typiques de la Hesbaye namuroise… Après le traditionnel café de début de BBB, on prend la direction de Jemeppe-sur-Sambre. Par Longchamps et Upigny (ah, le foie gras d'Upignac…), l'itinéraire est agréable et fait la part belle aux courbes moyennes à rapides. Attention toutefois aux limitations de vitesse dans les traversées de village: «ils» sont souvent là! On enjambe l'autoroute E411 à proximité de Dhuy, dernier village eghezéen, pour basculer vers l'entité de La Bruyère. À Saint-Denis, on abandonne la N912 pour prendre à gauche de petites routes de campagne. Nous sommes maintenant non loin de Bovesse où nous attend la première curiosité de cette balade: les vignes du Domaine du Chenoy et du Domaine du Ry d'Argent, qui produisent, entre autres, des rouges de qualité, labellisés «Côtes de Sambre-et-Meuse».
Le vignoble wallon
Pour les férus d'histoire, les premières traces de vignobles dans nos régions remontent à 815 après J.-C. et la vigne est cultivée dans le Namurois depuis peu avant l'an mil. Situé dans le prolongement géographique de celui de Champagne, le vignoble wallon a connu son heure de gloire du XIIIe au XVIe siècle. Après avoir quasiment disparu au XXe siècle, il a été relancé au début des années 2000. Beaucoup de vignes sont cependant exploitées uniquement pour le plaisir de leur propriétaire. Ce n'est pas le cas, ici, à La Bruyère, où la production déjà assez importante se voit commercialisée, sur une échelle sans doute encore modeste mais qui ne mérite plus le qualificatif de confidentielle. Ces deux domaines accueillent volontiers les vendangeurs amateurs au mois de septembre et octobre. L'occasion de vivre une expérience unique, sans devoir courir au fin fond de la France ou de l'Italie!
Lors de notre passage, on n'en était pas encore là et de belles grappes presque mûres nous attendaient. Rouler entre les vignes reste un vrai plaisir… Mais hélas, un plaisir de courte durée puisque les vignobles ne couvrent ici que quelques hectares. Allez, abandonnons la treille et son jus pour dégringoler vers la Sambre que nous rejoignons à hauteur de Floriffoux. Nous n'emprunterons le sillon sambrien que sur quelques kilomètres avant de grimper vers Bois-de-Villers en suivant une partie du tracé du «Circuit International de Floreffe», une course moto très réputée dans les années 50. Plus tard, l'épreuve fut remplacée par une course de côte où dans les années 90 encore, nous avons vu rouler Michel Siméon (oui, oui, le père de Xavier!). Mais le tracé est surtout connu par l'accident tragique au cours duquel le pilote écossais Fergus Anderson perdit la vie au guidon de sa BMW, en 1956. La maison percutée par Anderson dans la traversée de Buzet porte aujourd'hui une plaque commémorative. L'occasion de réaliser combien les compétitions d'alors étaient dangereuses: à cet endroit, Anderson n'avait quasi aucune chance de s'en sortir… La route se fait ensuite plus rectiligne et continue de monter à travers bois. Une fois au «sommet», à Bois-de-Villers, on prend à droite vers Lesve et Saint-Gérard. À partir d'Ermeton-sur-Biert (pas sur bière, bande de %*)????????COTIS & JBe ouverte to du mythe Porsche classiques
rer de près celle qui fut surnommée la "g!k que par les qualités du^£), le relief se fait plus accidenté et les courbes plus enthousiasmantes. Au fur et à mesure que l'on descend vers le sud, les villages se font plus espacés et les forêts plus présentes.
Au pays de Toine Culot
À Gochenée, nous marquons la pose au pied d'un arbre isolé. Une stèle y commémore le sacrifice de l'équipage canadien d'un bombardier Vickers Wellington, qui a péri ici au le 14 juillet 1943, au retour d'un raid sur l'Allemagne. On sait aujourd'hui que l'avion de la RCAF (Royal Canadian Air Force) a été abattu par un chasseur de nuit Messerschmitt 110, basé à Florennes… Au sortir des bois, on traverse la N40 reliant Philippeville à Givet. Doische n'est plus très loin. On profite de la traversée du village pour s'arrêter chez Daniel Périlleux que Tchè, notre photographe, tient à nous présenter. Une bonne idée: ses motos anciennes sont plus belles les unes que les autres et Daniel est un bonhomme passionnant. La route reliant Doische à Treignes passe par Gimnée, Niverlée et Mazée. Agréablement sinueuse, elle est aussi parfaitement revêtue, ce qui, s'agissant d'une route belge, relève de l'exceptionnel. À consommer sans modération…
Nous voici à présent dans l'entité de Viroinval, un nom forgé lors de la fusion des communes belges en 1976 et créé pour désigner les 8 villages qui la constituent. Parmi ceux-ci, Treignes n'est pas le moins attachant. C'est le pays natal de l'écrivain Arthur Masson, décédé en 1970, qui a laissé à la postérité les aventures de Toine Culot, maïeur d'un village wallon imaginaire appelé Trignolles mais qui est en fait Treignes. Mine de rien, le tirage total des œuvres d'Arthur Masson a atteint le million d'exemplaires. Pas mal pour un écrivain régional et «patoisant»! De nos jours, l'Espace Arthur Masson retrace la vie dans la région entre 1930 et 1960. Une visite émouvante et intéressante, particulièrement pour les amoureux de la langue wallonne. Plus d'infos sur www.espacemasson.be.
Refuge de maquisard
On quitte Treignes par le joli pont de pierres qui enjambe le Viroin et, à travers bois, on gagne Le Mesnil. Un peu l'impression d'être au bout du pays… Ce qui est effectivement le cas puisque, via Oignies-en-Thiérache, il ne reste plus qu'à se laisser glisser vers Fumay, en territoire français. Jadis connu pour ses ardoises de qualité, Fumay, en bord de Meuse, présente surtout pour les affamés que nous sommes l'intérêt de posséder un bon petit resto à la carte simple mais alléchante. Dommage que les beaux arbres de la place Aristide-Briand aient dû être abattus. Le cachet y perd ce que la commodité y gagne. Rassasiés et revigorés, nous reprenons la route en début d'après-midi. Cap sur Haybes, en longeant la Meuse, rive droite. La route s'élève ensuite insensiblement vers Hargnies, gros village cerné par la forêt, qui possède une immense et très belle place arborée. Par la D7, on revient en territoire belge et à Willerzie, nous entamons notre remontée vers le nord par Bourseigne et Felenne. On est certainement ici dans l'une des zones les moins peuplées de Belgique. Pas étonnant que le coin ait servi de refuge à de nombreux maquisards durant la dernière guerre…
Le temps de faire le plein peu avant Givet à l'une des pompes les moins chères de la province – la concurrence de la station Intermarché toute proche n'y est pas pour rien – et nous refaisons une brève incursion en France avant de poursuivre vers Houyet, en empruntant le chemin des écoliers par Heer, Blaimont et Mesnil-Saint-Blaise. Les lacets qui permettent de descendre et de ressortir de la vallée de la Lesse sont un classique toujours apprécié, même s'il peut y avoir trop de motos les week-ends d'été. La dernière partie de notre itinéraire navigue entre Dinant et Ciney par de toutes petites routes bien agréables mais qui nécessitent d'être attentifs au road-book. Les changements de direction sont nombreux et parfois très rapprochés. Par Dorinne, Durnal et Crupet (souvent visité par les BBB…), nous atteignons le drapeau à damier, à Courrière. Il était temps: notre ami Éric, pourtant motard plus qu'aguerri, n'en peut plus. «Le mal au c… avec cet ersatz de selle et ces amortos de Peugeot 103», nous explique-t-il devant un café fumant à la pâtisserie Pierson. Merci à lui pour cette abnégation qui nous a permis d'illustrer ces pages avec une moto pleine de caractère et résolument différente. Sur ce, bonne route à tous et prudence, toujours.
Carnet de route
– Le Domaine du Chenoy est le premier producteur de vins rouges en Belgique. Créé en 2003 par Philippe Grafé, il s'agit d'un vignoble de 10ha dont la spécificité réside essentiellement dans la plantation de nouvelles variétés plus résistantes aux maladies, mieux adaptées au climat wallon et produisant de surcroit des vins rouges, blancs et rosés de qualité, sans oublier les «Perles de Wallonie», un blanc pétillant bien agréable à l'apéro. Les cépages plantés sont le Bronner, le Merzling, l'Helios, le Johanniter et le Solaris pour les vins blancs, le Pinotin, le Rondo, le Cabertin et le Regent pour les vins rouges. Ils ont été créés ou adoptés par de grands instituts viticoles situés en Allemagne et en Suisse. Le Domaine du Chenoy produit un rouge labellisé AOC, le Côtes de Sambre-et-Meuse. Ces vins qui reflètent le plus fidèlement possible les caractéristiques de notre terroir sont naturellement légers en alcool, entre 11° et 12°. Ce sont des vins élégants et très digestes, tout en nuance et en finesse où les arômes et le fruité s’expriment et se développent dans une harmonie pleine de charme. Les vins du Chenoy sont en vente, sur place, au Domaine (boutique ouverte de 9h à 17h, sauf le dimanche) ainsi que sur www.domaine-du-chenoy.com.
Domaine du Chenoy, rue du Chenoy, 1b à 5080 La Bruyère. Tél.: 081/74.67.42.
– Le Domaine du Ry d'Argent se situe juste à côté du Domaine du Chenoy, sur un coteau exposé au sud. Il tire son nom du ruisseau qui coule au pied du vignoble. Celui-ci a été créé entre 2005 et 2007 par la famille Baele et compte 5 hectares de vignes. Quatre sont plantés en cépages rouges (Regent, Cabernet-Jura et Dornfelder), qui produisent du Côtes de Sambre-et-Meuse, et un en blanc (Solaris). Tous ces cépages sont d'origine allemande. Le Domaine est ouvert du lundi au samedi, de 10h à 17 h. Visite également possible les dimanches et jours fériés, sur rendez-vous.
Domaine du Ry d'Argent, rue de la Distillerie, 51 à 5081 Bovesse. Tél.: 081/56.65.45.
– À Doische, les amateurs de motos anciennes s'arrêteront avec plaisir chez Daniel Périlleux qui possède une magnifique collection de très belles machines, dont beaucoup d'anglaises on ne peut plus désirables (ah, la Velocette Thruxton…). Attention, ce n'est pas un musée ouvert au public mais un lieu privé où rien n'est prévu pour accueillir les visiteurs. Prévenez Daniel de votre passage au 0475/50.68.58 (adresse: rue Martin Sandron, 139 à 5680 Doische) pour voir s'il peut vous accueillir à quelques-uns (pas plus!).
– La «Plaine Buffle», près de Bourseigne-Neuve (l'itinéraire y passe…), est une vaste clairière isolée dont les dimensions et le silence impressionnent. C'est ici qu'au cours de l'été 1944 les maquisards de l'Armée Secrète (AS) ont accueilli les parachutistes du Spécial Air Service belge, engagés pour libérer le pays. Pause «mémoire» obligatoire…
Arrêts gourmands
– À Eghezée, la boulangerie-pâtisserie Olivier Mathy dispose de quelques tables (avec vue sur l'atelier, svp!) où l'on peut prendre un café et déguster les remarquables croissants faits maison, vraiment dignes des meilleurs produits français! Évitez toutefois de débarquer à plus de 3 ou 4: le salon de dégustation est tout petit…
Boulangerie-pâtisserie Olivier Mathy, chaussée de Namur, 32 à 5310 Eghezée. Tél.: 081/74.41.11.
– À Fumay, est-il possible d'aller manger ailleurs qu'à L'Hostellerie de la Vallée? Sous ce nom qui pourrait faire croire qu'il s'agit d'un établissement prétentieux, pratiquant des tarifs inabordables, se cache en fait le vrai petit resto français comme on les aime, avec plein de plats traditionnels comme la tête de veau, l'andouillette fermière (à se taper la tête au mur!) ou encore le jambonneau à l'ardennaise. Une mention aussi à l'excellente terrine maison. On mange au menu (menu «Ardoisier» à 17,90€ le midi en semaine et menu «Sainte-Anne» à 34,80€) ou à la carte. Et si l'on n'a qu'une petite faim, il y a aussi des salades et des plats express. Préférez la première salle à la seconde, plus impersonnelle. Terrasse sur la place si la météo le permet. Attention, l'endroit est très couru, donc il est quasi indispensable de réserver…
Hostellerie de la Vallée, place Aristide-Briand, 24 à 08170 Fumay. Tél.: +33/(0)3.24.41.15.61, www.hostelleriedelavallée.com.
– À Courrière, la Pâtisserie Pierson est une institution, depuis 1919. Située au terme de cette BBB, sur la N4, elle vous régalera à toute heure d'une part de tarte ou de gâteau, avec un bon café (de chez Delahaut, à Namur… une référence!). Il est aussi possible de manger quelque chose de plus consistant avant de reprendre la route, comme des pâtes, une omelette (vaste choix!), une salade… Service diligent et sympathique. À noter aussi, une salle où l'on n'est pas les uns sur les autres, ce qui est de plus en plus rare, et une pompe à essence juste à côté.
Pâtisserie Pierson, chaussée de Luxembourg (N4), 5336 Courrière. Tél.: 083/65.53.01. www.pierson-courriere.be.