Huit beaux villages de Wallonie
Nous avons tracé un bel itinéraire condruzo-ardennais reliant huit des plus beaux villages de Wallonie. Au programme, bien des découvertes et surtout beaucoup, beaucoup de plaisir de rouler… C’est parti pour plus de 200 bornes de routes diverses et variées, souvent bien sinueuses…
Texte Philippe Bonamis et Jacques Berghmans – Photos Jonathan Godin
Avec l’amicale participation d’Eric Nicloux.
La nouvelle n’a pas fait grand bruit, mais elle a retenu l’attention des amateurs de beaux coins et de belles routes que nous sommes. Depuis la fin avril, les «plus beaux villages de Wallonie», ne sont plus 24 mais 28! Nous avions d’abord pensé relier les 4 nouveaux villages sélectionnés qui sont Barbençon, Chassepierre, Limbourg et Mirwart. Un rapide coup d’œil à la Michelin Belgique Sud nous en a dissuadé: trop de kilomètres, souvent peu intéressants, entre ces villages très éloignés les uns des autres. De Barbençon, à côté de Beaumont, à Limbourg, proche de Verviers, il y a une fameuse trotte… Surtout s’il fallait passer par Chassepierre et la vallée de la Semois (chère au cœur du rédac’chef…). Aussi avons-nous préféré vous concocter un bel itinéraire qui visite Mirwart, le 4e de nos nouveaux «plus beaux villages de Wallonie», non loin de Saint-Hubert, mais vous fera aussi découvrir 7 autres villages, certains plus intéressants que d’autres, il faut bien l’avouer. Mais côté belles routes, vous allez être servis! C’est parmi ce qu’on peut trouver de mieux, en Belgique du moins.
Le rendez-vous était fixé à la Pâtisserie Pierson à Courrière, sur la N4. Eric et votre serviteur sont (presque…) voisins des lieux mais Jonathan qui vient de plus loin est lui aussi pile à l’heure. Tant mieux, parce que le programme s’annonce chargé. Et le terrain n’est pas toujours tel qu’on le croit en consultant la carte au 1/200.00 de Monsieur Michelin ou les cartes de Mister Garmin, ainsi que nous allons le voir.
Quelques valeurs sûres
On commence par des routes et des villages que les fidèles lecteurs des BBB commencent à bien connaître – la Wallonie est un mouchoir de poche, on n’y peut rien – mais qui se révèlent bien agréables quand même. Les premiers kilomètres nous font traverser Maillen puis Crupet. La descente sur ce dernier village est toujours un ravissement, à travers un paysage de bois et de «pachis» tout verdoyants. Normal, avec ce qu’il est tombé en ce mois de juin, nous direz-vous…
Crupet recèle bien des coins charmants, avec un centre croquignolet, mais aussi certaines constructions qui font tâche et nuisent au caractère de l’ensemble. Reste que l’église Saint-Martin et son presbytère méritent une halte, tout comme le château entouré d’eau (mais l’étang avait été vidé lors de notre passage…). Et puis il y a toujours l’étonnante et kitschissime grotte artificielle retraçant la vie de saint Antoine de Padoue…
A la sortie de Crupet, cap sur Durnal et Dorinne, puis Lisogne et Thynes. Ça n’arrête pas de tournicoter et ça grimpe parfois assez fort, avant de dégringoler aussi sec! Mais gaffe à l’étroitesse de certaines routes. A Foy-Notre-Dame, nous croisons des motards italiens: les charmes de la Wallonie font recette même au-delà de nos frontières! Franchissement rapide du «porche» de la localité: la route passe littéralement à travers une maison. Etonnant.
Nous arrivons maintenant à Celles, un autre «plus beau village de Wallonie», où le blindé allemand de l’offensive von Rundstedt est toujours là. Et toujours sans ses chenilles… Celles, tapi au cœur d’un vallon entouré de quatre collines, revendique des origines très anciennes, qui remonteraient à l’an 669 et à l’arrivée du moine Hadelin dont l’église conserve le souvenir. L’habitat traditionnel en pierres calcaires et les toits d’ardoise donnent aux lieux pas mal de cachet. Du cachet, les kilomètres qui suivent en revendiquent aussi, avec de nombreux virolos, dont la légendaire descente sur Houyet, très appréciée des motards du nord du pays, nombreux ici le week-end.
Au centre de Houyet, on ne remontera pas de l’autre côté de la vallée de la Lesse, mais on empruntera une petite route tranquille et pittoresque, direction Hour puis Focant. Le paysage s’ouvre et nos regards embrassent un large panorama. Las, de gros nuages menaçants se profilent à l’ouest, vers Givet… Or Jonathan a encore des photos à faire et comme tous les photographes il déteste la pluie… Donc, gaz! Nous entamons une longue partie de cache-cache avec ces nuages copieusement chargés de flotte… Un peu dommage pour Sohier, notre troisième «plus beau village», que nous atteignons alors que les premières gouttes viennent s’écraser sur nos écrans. Et dire que nous avions déjà dû annuler une reconnaissance pour cause de météo totalement incompatible. Foutu pays!
Retour au Fournau Saint-Michel
Village rue typique de la Famenne, Sohier ne sera donc qu’effleuré. Nous fuyons le mauvais temps vers l’est et Tellin, où les cieux semblent encore dégagés. A Grupont nous délaissons la N846 pour bifurquer vers le sud et Mirwart, notre quatrième village. Le premier contact avec Mirwart nous déçoit un peu: chalets de bois peu esthétiques, Centre d’Hébergement et de Loisirs de la province de Luxembourg dont le bâtiment principal a connu des jours meilleurs… Pas génial… Heureusement que le centre du village, agréable, et la vue sur le château, plaisante, viennent corriger cette première impression. Mirwart accueille aussi un domaine provincial qui plaira à tous ceux qui recherchent un peu de quiétude et de calme, mais qui s’adresse à un public essentiellement familial.
A partir d’ici, il était dans nos intentions de rejoindre Awenne, jadis connu pour ses sabotiers, par une toute petite route serpentant à travers bois. Or la dite route s’est transformée rapidement en chemin… Pas trop de gadoue, heureusement, et l’Africa Twin se montre plutôt à l’aise sur ce genre de terrain, malgré ses pneus trail à profil très routier. On finit par rejoindre la route reliant Saint-Hubert à Grupont, mais ce passage devra être zappé, parce qu’impraticable pour de pures routières. Nous contournons donc la difficulté par le sud, via Smuid, Libin, et Poix Saint-Hubert. Eh oui, les reconnaissances, ce n’est pas pour des prunes qu’on les fait!
L’Ardenne sous le déluge
On remonte ensuite plein nord, direction Nassogne. La route aux larges courbes serait agréable si elle n’était pas grasse et détrempée. La pluie qui nous a rejoints ne tarde pas à se déchaîner et c’est sous des hallebardes que nous arrivons au Fourneau Saint-Michel, où l’Auberge du Prévôt nous fait bon accueil, malgré les litres d’eau qui dégoulinent de nos vestes, casques et pantalons. Vous le voyez, pour vous concocter chaque mois votre BBB toute prête, il faut parfois mouiller son maillot au sens propre du terme! Une heure plus tard, rassasiés, nous reprenons la route. Miracle, il ne pleut presque plus. Mais des nuages de mauvais augure s’acharnent à nous poursuivre… Nassogne et Grune sont déjà dans le rétroviseur et nous enjambons la N4 à hauteur de Bande.
Chéoux nous voit passer à vitesse grand V, pressés que nous sommes de rejoindre la vallée de l’Ourthe. Et à Hotton, ça ne rate pas: la pluie refait son apparition. Faible jusqu’aux abords de Ny, le cinquième de nos beaux villages – qui vaut surtout par son église et son imposante ferme-château – elle s’intensifie ensuite. Jonathan nous lâche dégoûté: «Impossible de faire quoi que ce soit dans ces conditions les gars, je suis pas équipé pour la photos sous-marine». Nous arrivons à Wéris, notre sixième «beau village» sous une pluie torrentielle. Il ne reste plus qu’à aller boire un café bien chaud à la «Maison des Mégalithes». Merci à la gérante pour son accueil sympa, malgré nos équipements ruisselants!
Tout arrivant à qui sait attendre (longtemps…), les vannes célestes finissent par se refermer et nous repartons. Nous laissons de côté Barvaux et Durbuy, trop touristiques à notre goût, pour privilégier Chardeneux, que je ne connaissais pas. Une découverte que ce petit village condruzien, accroché à la pente. Sa jolie place, d’où rayonnent de petites rues, serait bien sympathique sans cette pluie qui nous arrose à nouveau. Les photos, ce sera pour une autre fois, au même titre que la visite du «pont-lavoir» de la première moitié du XIXe siècle, où un petit escalier assurait jadis un accès direct à l’eau du ruisseau pour les lavandières.
Pour finir en beauté
Notre itinéraire entre à présent dans ses derniers kilomètres, qui ne sont pas les moins plaisants, rassurez-vous, surtout que la pluie a enfin cessé. Après avoir revisité les sites de Vervoz, près d’Ocquier, et du château de Hoyoux, qui vous feront évoluer dans un cadre qui évoque irrésistiblement la vieille Angleterre, nous retrouvons avec plaisir un autre classique condruzien, Saint-Fontaine, à un jet de pierre du château du même nom. Le parcours de la BBB y emprunte un gué: eh oui, la route, tout ce qu’il y a d’asphalté, coupe un petit ruisseau! Pas d’inquiétude toutefois: ça passe avec n’importe quelle moto, même une Gold Wing ou une supersportive. Les possesseurs de trails seront évidemment plus à l’aise, mais qu’il n’en profitent pas pour jouer les enduristes: les lieux sont habités et il serait dommage que les passages répétés de quelques imbéciles viennent sonner le glas de la liberté de circulation dans ce joli hameau. Notre liberté est déjà suffisamment entravée et cadenassée comme ça!
A Ossogne, nous rejoignons la route qui conduit à Ohey. Nous aurions pu l’emprunter pour atteindre Gesves mais nous avons préféré un détour bucolique par Montegnet, Flostoy, et Doyon, de petits villages et hameaux qui restent à peu près préservés, mais pour combien de temps encore? Notre final sera constitué par la tortueuse vallée du Samson, un classique toujours apprécié, et moins fréquentée que la Molignée, usée jusqu’à la corde si vous voulez notre avis… C’est juste avant le baisser du drapeau à damier que nous attend notre huitième et dernier village: Mozet. Un vrai village condruzien de carte postale, joliment fleuri et arboré, rehaussé de très belles fermes et d’un château. Tout est impeccablement entretenu et restauré. Habiter ici n’est pas à la portée de toutes les bourses, c’est sûr. Goyet, où se termine cette BBB, nous fait retrouver la vallée du Samson, et nous prenons le verre de l’amitié. Namur et l’E411 ne sont plus qu’à quelques coups de gaz, que ce soit via Wierde ou Loyers. Bonne route à tous et prudence, toujours.
Carnet de route
– Pour tout savoir sur les «plus beaux villages de Wallonie», le site de l’association en question est un incontournable: www.beauxvillages.be. Il vous présentera chacun des 28 villages, vous donnera des idées de visites et d’activités. Il reprend aussi différentes adresses de restaus, gîtes et hôtels. A consulter sans modération, surtout que le site est riche de beaucoup de belles photos.
– Le Fourneau Saint-Michel: le domaine provincial du Fourneau Saint-Michel, niché dans la vallée de la Masblette, au nord de Saint-Hubert, est consacré à l’architecture et au mode de vie de l’Ardenne d’autrefois. Des habitations et des fermes, mais aussi une école et une chapelle ont été démontées sur leur lieu d’origine pour être remontées ici, avec une grande rigueur scientifique. C’est un peu l’équivalent wallon, mutatis mutandis, de Bokrijk, c’est-à-dire un musée de la vie rurale grandeur nature. Le site doit son nom à l’exceptionnel haut-fourneau qui a été construit ici par Dom Nicolas Spirlet, dernier père-abbé de Saint-Hubert. Le site accueille également différentes expositions et animations temporaires, tout au long de l’année. Infos, tarifs et horaires sur www.fourneausaintmichel.be
– Les grottes de Hotton: classées «patrimoine exceptionnel de Wallonie», les grottes de Hotton n’ont été découvertes qu’en 1958. Elles vous feront descendre jusqu’à 65 m de profondeur pour découvrir une extraordinaire rivière souterraine, avant de remonter vers la surface, d’abord à pied (30m) puis en ascenseur (35m). Le site a reçu 2 étoiles au Guide Vert Michelin.
Infos, tarifs et horaires sur www.grottesdehotton.be ou au 084/46.60.46
– Les dolmens de Wéris: Le terme «dolmen» a été constitué des mots bretons «dol» (table) et «men» (pierre) par les archéologues du XIXe siècle. Ces monuments funéraires sont recouverts soit d’un tumulus de terre cerné de blocs ou de parements de pierre, soit d’un cairn (recouvrement de pierres). Le site de Wéris comprend deux dolmens, distants l’un de l’autre de 1.500 m: le dolmen de Wéris proprement dit, également appelé «dolmen nord» et le dolmen d’Oppagne, aussi connu sous le nom de «dolmen sud». Les dolmens de Wéris, remontent au 3e millénaire. Ils sont du type dit «allée couverte»: La chambre funéraire s’allonge, devenant une chambre-couloir. Celle-ci est précédée d’un vestibule court, avec entre les deux une cloison. Le nombre de défunts inhumés augmente, signe du développement démographique. Notre itinéraire vous fera découvrir le dolmen nord, sur le côté gauche de la route à la sortie de la localité. Attention, il est strictement interdit de monter sur les dolmens ou de pénétrer à l’intérieur. Par respect d’abord – ce sont des tombes – mais aussi pour des raisons de sécurité: un bloc de poudingue, la roche dont sont constitués ces monuments, peut se fendre brusquement. Pour en savoir plus sur les dolmens, on peut s’arrêter à la Maison des Mégalithes, au centre du village de Wéris. On y trouve un petit musée et une taverne accueillante. Plus d’infos sur www.weris-info.be
– Vervoz (Ocquier): les BBB étaient déjà passées par ici en juillet 2011, mais dans l’autre sens. Reste que Vervoz est toujours aussi paisible. Le site comprend un château (privé, pas de visite), une chapelle et un étang. A l’entrée de Vervoz en venant d’Ocquier, très beau gîte à louer sur le côté droit de la route, en contrebas. Avis aux amateurs de quiétude.
– Le château du Hoyoux: un endroit assez incroyable, que nous avions également visité voici 5 ans. Le château du Hoyoux, blotti dans la vallée du même nom, vous transportera l’espace de quelques centaines de mètres de l’autre côté de la Manche. On s’y croirait, avec ces pelouses impeccables à perte de vue et ces bâtiments anciens soigneusement restaurés! On a l’impression de traverser à moto quelque parc appartenant à un lord dont on s’attend à voir surgir la Bentley d’un instant à l’autre! Et tout ça le plus légalement du monde, puisque vous ne quitterez pas un instant la route…
Arrêts gourmands
– Nous avions déjà fait de la Pâtisserie Pierson à Courrière le point d’arrivée d’une BBB. Cette fois, nous avons choisi cet établissement, idéalement situé sur la N4 Namur-Bastogne, comme point de départ. L’endroit est parfait pour attendre les copains devant un bon café, de la réputée Maison Delahaut à Namur qui plus est! C’est ouvert 7 jours sur 7, les prix sont raisonnables, le service diligent et sympathique et il y a un grand parking ainsi qu’une station-service à 10m, pour les distraits qui ont négligé de faire le plein avant de partir.
Pâtisserie Pierson, chaussée de Luxembourg (N4), 5336 Courrière. Tél.: 083/65.53.01. www.pierson-courriere.be
– Le hasard (que nous avons un peu aidé, d’accord…) a fait que nous sommes arrivés au Fourneau Saint-Michel à l’heure de casser la croûte et alors que des trombes d’eau s’abattaient sur la région. Autant vous dire que, dans ce contexte, notre arrêt à l’Auberge du Prévôt, installée dans une ravissante maison à colombages du XVIIIe siècle, fut des plus revigorants… Le chef vous y propose de la petite restauration ou une cuisine plus élaborée, au choix, mais toujours à base de produits du terroir. Le tout à des prix très compétitifs. Le plat du jour à 10€ (servi du mardi au vendredi, uniquement le midi), est tout à fait recommandable – nous avons goûté la côte de porc dijonnaise et le filet de truite saumonée en croûte de sel, très bien tous les deux). A noter aussi un tartare de BBB (pour Blanc Bleu Belge, évidemment!) et des planches de charcuteries savoureuses. Ouvert tous les jours de mars à novembre, entre 10 et 18h. Fermé le lundi.
Auberge du Prévôt, Domaine du Fourneau Saint-Michel, 6870 Saint-Hubert. Tél.: 084/44.48.11
– Pour boire un dernier pot avant de se quitter et de rentrer chacun à la maison, la taverne-restaurant Le Petit Pont à Goyet est une bonne adresse. L’endroit est réputé pour ses viandes, mais la terrasse est bien agréable pour boire simplement un verre en écoutant le clapotis du Samson. Petit parking juste devant l’établissement. Ouvert tous les jours, sauf les mardis et mercredis, de 18h30 à 22h.
Le Petit-Pont, 13 chaussée de Gramptinne, 5340 Goyet. Tél.: 081/58.12.23. www.petitpont.be