Essai Moto Morini Corsaro 1200 ZT: tempérament de feu!

Essais Motos Bruno Wouters
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Pour les constructeurs italiens, la vie n’est pas toujours un fleuve tranquille, l’histoire de Moto Morini en fait foi ! Pourtant, les produits badgés du double « M » sont toujours là, et se veulent plus accessibles avec cette ZT!

Nous ne reviendrons pas ici sur l’histoire mouvementée de la marque. Mais retenons toutefois que la première commercialisation de la Corsaro remonte à… 2006! Alors, «has been», cette Corsaro ZT? Ben non, pas vraiment, en fait! parce que si les années ont passé, la moto a évolué.

Depuis la dernière reprise de la marque en 2011, la Corsaro a été remise en production en 2012, et en a conservé les fondamentaux. Nous retrouvons donc le Bialbero 1200 Corsacorta, un bicylindre en V à 87° cubant précisément 1.187cc. Ce moteur ne manque pas d’originalité, avec ses cylindres solidaires des carters et son alésage record de 107mm pour une course réduite à seulement 66mm: Franco Lambertini, le concepteur de cette mécanique, ne manque ni de talent ni de légitimité! Transfuge de chez Ferrari, il débarque en 1970 chez Moto Morini et conçoit le moteur V2 de la brillante Moto Morini 3½, dont les nostalgiques se souviennent encore.

Les recettes utilisées par Lambertini sur ce «Corsacorta» auraient inspiré d’autres constructeurs italiens et non des moindres, preuve s’il en est des qualités du bouilleur siglé Moto Morini. Autre élément marquant de la Corsaro: son cadre tubulaire, extrêmement rigide, est reconduit. Nouveauté, la Corsaro ZT, étroitement dérivée de la ZZ, se veut moins élitiste que cette dernière, Moto Morini souhaitant rendre la marque plus accessible, en tout cas financièrement.

La ZT se distingue de la ZZ par assez peu de choses, en fait. Mais suffisamment pour rendre bien différente la conduite de ces deux machines. Le bialbero ne change pas, les périphériques non plus, hormis l’absence de traitement DLC des tubes de fourche: la ZT récupère le freinage Brembo (des étriers monobloc M50), exhibe avec fierté ses deux silencieux, dorénavant siglés Zard, dressés vers le ciel.

 

Guère différente de la ZZ

Elle se différencie cependant de la ZZ par quelques pièces moins nobles qui abandonnent le carbone pour un plastique davantage plébéien mais aussi par un classique phare rond halogène en lieu et place du double optique à LEDs, ce qui lui donne dans la foulée une touche plus rétro.

La ZT revendique encore un tableau de bord positionné différemment et, surtout, un autre réservoir, de plus petite taille et qui abandonne l’aluminium pour, ici aussi, de la matière plastique. Étonnamment, cela change tout au niveau du ressenti sur la moto, alors que selle, repose-pieds et guidon sont restés identiques! La forme différente du réservoir donne ici le sentiment d’être plus assis sur la moto que dedans, avec la sensation de se retrouver plus sur le train avant.

Moins élitiste donc, la ZT, grâce à quelques économies judicieusement ciblées et un semblant de personnalité propre principalement souligné par le phare mais guère différente de la ZZ, pour un ticket d’entrée sensiblement plus accessible. Cela commence à ressembler à une bonne affaire, d’autant que la ZT est annoncée avec quelques kilos de moins sur la balance!

La bonne affaire, elle se confirme en détaillant la machine en statique: le matériel Brembo au top avec les maîtres cylindres à pompe radiale au guidon ; une fourche splendide, siglée Mupo, solidement ancrée dans de robustes tés, avec une partie inférieure joliment travaillée à la hauteur de la fixation des étriers monobloc, le fraisage rappelant le «M» de Morini, alors qu’au sommet des tubes sont montées les molettes de réglage en alu fraisé, réglables à la main.

Un détail sans doute mais Morini nous épargne les catadioptres ronds à trois centimes échappés d’un scooter chinois pour de plus classieux éléments rectangulaires joliment intégrés sur les fourreaux de la fourche.

 

Tempérament de feu

Tous les éléments respirent la qualité et la peinture se révèle irréprochable. Plus globalement, la silhouette de la Morini a quand même vieilli, avec ses petits airs de Suzuki SV ou ses énormes tromblons pointés vers le ciel. Et on sent bien que le canister de récupération des vapeurs, imposé par la norme Euro 4, n’attend qu’une chose: être viré au plus vite du flanc droit du moteur…

Ah, ce moteur! Dès le premier coup de starter, il annonce la couleur! Les Zard dressés vers le ciel s’expriment avec vigueur, tandis que les rapports passent tout en douceur, avec une boîte et un embrayage n’appelant aucune critique. Les montées en régime sont immédiates: le Bialbero 1200 Corsa Corta se passant de tout arbre d’équilibrage, il ne souffre d’aucune inertie et se montre incroyablement réactif.

Avec ses larges culasses, il bénéficie d’un remplissage optimal et vous arrache les bras à tous les régimes. Totalement réjouissant, et on ne se lasse pas d’essorer la poignée à la moindre occasion.

Au niveau du comportement, il faut bien garder quelques points en mémoire. Avec un empattement plutôt court et l’étroitesse que permet le bicylindre transversal, nous avons affaire à une machine plutôt menue, hormis la hauteur de selle, 860mm, pas ce qu’il y de plus bas. Résultat, on se retrouve haut perché, sur une moto courte, avec un centre de gravité plutôt haut perché lui aussi.

Autant dire que si la Morini se révèle rigide et très agile, elle se montre aussi vive, très vive dans ses réactions. Mieux vaut savoir ce qu’on fait, avec des réactions amplifiées par ce berlingot vieux de plus de dix ans mais guère avare en sensations, et qui pousse à tous les étages! Ensuite, toutes les figures sont possibles avec une moto reine des wheelings et un goût certain pour les stoppies, facilités par un ABS totalement déconnectable! J’en connais un à la rédaction à qui ça va plaire, n’est-ce pas Grim?

Conclusion

Attachante, cette Morini. Un assemblage (à la main s’il vous plaît!) de belles pièces, un moteur de rêve, vraiment, un refus absolu d’assistances électronique… La recette est épicée mais goûteuse!

Si la partie-cycle demande un minimum d’expérience pour en tirer parti, elle demeure rigoureuse et efficace, à l’unisson des suspensions et des freins. Reste à adhérer à son style un peu vieillot et se sentir prêt à encaisser les «Moto Morini? Connais pas…» de nombreux motards, heureusement compensés par l’air entendu et admiratif de ceux qui «savent»…

 

Les up

– Moteur explosif

– Absence de béquilles électroniques

– Exclusivité

Les down

– Expérience requise

– Réseau à construire

– Style banal

 

Prix de base: 15.990€

Consommation: non mesurée

Disponibilité: sur commande