Ceux qui n’étaient pas totalement convaincus par la conduite d’un Can-Am mais qui avaient néanmoins fait preuve d’ouverture d’esprit en prenant leur guidon, reprochaient généralement à ces machines un peu particulières une conduite peu récréative et un tarif de base salé. Le Ryker a pour mission d’éliminer ces deux griefs.
Car même si je suis fan des Can-Am, je ne puis dire que ces critiques ne sont pas fondées. Au contraire, je les comprends parfaitement. Conduire un Can-Am Spyder ne représente pas l’expérience la plus excitante qui soit. À son guidon, difficile de se prendre pour le roi des virolos ou pour l’empereur du drag race. Tout simplement… parce qu’un Can-Am n’est pas fait pour cela!
Même si ses performances et ses aptitudes ne sont pas à sous-estimer, les réglages très castrateurs de son électronique vous calmeront avant que vous n’ayez eu le temps de vous en rendre compte. Non, un Can-Am se destine avant tout à un roulage touristique ou pratique et c’est dans cet état d’esprit uniquement que vous devez envisager son utilisation, si le tarif réclamé rencontre vos possibilités budgétaires. Mais ça, c’était avant.
Avec l’arrivée du Ryker, Can-Am complète sa gamme avec une machine nettement plus accessible financièrement et, surtout, au positionnement fondamentalement différent. Là où un Spyder parlait à un quinqua baladeur, le Ryker a pour objectif de séduire davantage de trentenaires sportifs, voire carrément d’aller recruter en dehors du vivier des motards. Voici donc le très simple cahier des charges de la machine que nous avons pu découvrir à Faro, au Portugal, où, décidément, tous les constructeurs ont visiblement décidé de nous convier depuis quelques mois pour dévoiler leurs nouveautés.
Simplification
Le Can-Am Ryker est disponibles en deux motorisations: 600cc et 900cc. Leurs différences? Les tarifs: 9.899€ pour le premier, 11.599€ pour le second. Leur moteurs: un bloc bicylindre développant 50ch à 7.300tr/min et 49,7Nm à 6.000tr/min pour le «petit» contre un trois pattes de 82ch à 8.000tr/min et 79,1Nm à 6.500tr/min pour le «grand». Notons encore une selle et une garde au sol 2mm plus hautes pour le 600 mais 10kg de moins sur la balance. Enfin, le 900 bénéficie de deux modes de conduite, Eco et Sport. Châssis, électronique embarquée, transmission, freins, pneumatiques, dimensions et instrumentation s’avèrent, de leur côté, rigoureusement identiques.
Sur ce nouveau Can-Am, on retrouve une transmission automatique. Par contre, plus de palettes pour passer les vitesses, tout est automatisé à la montée comme à la descente. Nous craignions une gestion un peu compliquée en ville mais tout s’est bien passé de ce côté. Le système de montage personnalisé U-Fit se révèle désormais beaucoup plus pratique. Fini de devoir prendre rendez-vous en concession pour adapter la machine à une morphologie: en un tour de main et en un instant, vous réglez la profondeur du guidon et/ou des repose-pieds, ainsi que l’inclinaison de la pédale de frein. Car oui, pour freiner, tout se passe toujours – et uniquement – au pied droit.
Plus compact, plus bas et plus ramassé, le Ryker abandonne les espaces de rangement que l’on peut retrouver sur un Spyder. Tous, sauf une boîte à gants – non verrouillable – d’une capacité de 7 litres et proposant deux prises USB. Enfin, le Ryker joue à outrance la carte de la personnalisation. Plus de 75.000 combinaisons d’accessoires visuels et fonctionnels vous permettront de rendre votre machine unique… et de faire grimper l’addition: support arrière pour passager ou chargement (372€), siège passager (342€), décalques pour roues (38€), accents pour roues (64€), garde-boue (181€), poignées sport (44€), déflecteur de console (95€), décalque pour déflecteur de console (38€)… on en passe et des meilleures.
Pour l’ambiance à bord par contre, un mot prédomine: la simplification. Le tableau de bord a fondu mais il reste néanmoins très lisible. Deux boutons permettent d’afficher la vitesse, le régime moteur, l’odomètre, les deux trips, la jauge, l’autonomie, l’horloge ainsi que le mode de conduite sélectionné. La procédure de mise en marche a été modifiée sans pour autant devenir beaucoup plus simple. Et c’est pareil pour enclencher la marche arrière: plus de commodo mais une poignée placée sur le flanc gauche à manipuler. Le régulateur de vitesse a également disparu, tout comme les appels de phare.
2+1 versions
Mais ce n’est pas tout. Il existe, en réalité, une 3e version du Ryker; l’Édition Rallye (uniquement en 900cc), qui va désormais permettre de quitter l’asphalte en Can-Am! Celle-ci se distingue par différents attributs comme ses roues arrière de 15 pouces, des pneus tous chemins et des roues renforcées, des protège-mains, un renforcement du sous-bassement, une selle Rallye rembourée et placée à 651mm, une protection de calandre, un poids de 285kg, un mode Rallye au VSS optimisé dans l’optique notamment de pouvoir s’autoriser et contrôler des dérapages, ainsi qu’une structure «1+1 ready» qui augmente par ailleurs les capacités d’emport.
En outre, les suspensions sont signées Kayaba, elles bénéficient d’un débattement plus grand (162mm et 175mm) avec ajustement possible de la précharge pour l’avant et de la compression et de la précharge à l’arrière. Pour prendre la mesure de la bête, nous nous élançons en mode Eco, calibré pour optimiser la consommation de carburant. Plus léger de 130kg par rapport au moins lourd des Spyder, le Ryker fait preuve d’une agilité inédite pour un Can-Am. On le place nettement plus aisément sur la route et son agilité surprend. Quelques kilomètres sur routes défoncées nous font apprécier l’amortissement du train avant. L’arrière, par contre, tape bien davantage et ne ménage pas le séant.
Le Rotax 900 ACE révèle plusieurs visages. Très calme et assez peu expressif à bas régime, il se réveille à partir de 5.000 tours et commence à «causer sérieusement». Nous profitons d’une longue ligne droite pour le pousser (presque) dans ses derniers retranchements: 160 compteur. Pas mal! Si le Ryker tient assez bien sa ligne, à cette vitesse, mieux vaut quand même bien tenir le guidon, le train avant double «cherchant» en permanence sa voie.
Avec une moto, vous ne pouvez pas avoir une roue avant plus haute que l’autre, ou une roue secouée par une bosse tandis que l’autre croise peinard. Toutes ces petites «perturbations» entrainent du mouvement dans le train avant. Des mouvements qu’il conviendra de contrôler en tenant fermement le guidon mais tout en gardant de la souplesse dans les bras.
De toute façon, avec l’absence de protection, on prend le vent en plein plastron et tenir bon la barre va de soi. Intéressant en ville pour adopter une conduite en souplesse, le mode Eco sera vite abandonné en terrain sinueux. On passe au mode sport. L’ambiance change et le Ryker se transforme en apprenti hooligan de la route. Ce mode de conduite désactive, en effet, l’antipatinage arrière sur les phases d’accélération. Résultat: chaque feu rouge devient un départ de GP, crissement de pneus et trace de gomme inclus, et chaque changement de direction s’accompagne de son sympathique petit drift, immédiatement rattrapé par l'électronique, on vous rassure.
Hooligan
À la question «Est-ce amusant?», je répondrai oui, oh que oui! À la question «Est-ce bien raisonnable?» Je sortirai immédiatement mon joker et laisserai la parole au voisinage, voire à l'agent de quartier… Et puis, en conduisant de la sorte, notre moyenne du jour s'est plantée à 9,4l/100km.
Ce n'est pas rien. Sans compter sur l'espérance de vie des gommards qui en a également pris un sérieux coup… Si l'on veut évier de mettre plus qu'il n'en faut la main au portefeuille, le Ryker ira donc plutôt chercher son terrain de jeu là où chassent traditionnellement les sportives et les roadsters: une petite route bien sinueuse où l'on s'amusera à enquiller les virolos juste à la limite de l'intervention de l'électronique. Ou alors carrément sur une piste de gravier, à travers champs ou forêts, pour s'autoriser le plaisir que les centres urbains ne permettent plus.
Et dans cette optique, l'idée a priori saugrenue de sortir de l'asphalte en Ryker Rallye Edition prendra tout son sens, même si sa garde au sol ne se révèle pas folichonne: à peine 1cm de plus que les versions 600 et 900 «route». Je profite d’une nouvelle portion de lacets pour maltraiter le Ryker. D’abord pour solliciter copieusement les freins. Ceux-ci répondent efficacement, et stoppent rapidement l’attelage. Mais attention aux mouvements de l’engin et à la tendance au soulèvement du train arrière sur ces phases.
Conclusion
Équipé d'un contrôle de stabilité, d'un contrôle de traction et d'un ABS qui agissent en permanence sur le comportement du véhicule, le Ryker reste un Can-Am sécuritaire, avec une électronique interventionniste. Mais avec son poids réduit, son agilité inédite et ses modes de conduite Sport et Rallye, il autorise une conduite beaucoup plus amusante que précédemment. On regrette par contre toujours une finition un peu limite comme cette absence de bouchon de réservoir, ou le frein de parking qui frotte contre le carénage. Mais avec un prix d'achat nettement plus accessible, on pardonne davantage ces petits défauts que sur les plus onéreux Spyder.
Les up
– Beaucoup plus joueur
– Beaucoup plus maniable
– Moteur surprenant
Les down
– Gaffe aux consommables
– Arrière tape-cul
– Tarif avec options à surveiller
Prix de base: 9.899€
Consommation affichée: 9,4l/100km
Disponibilité: immédiate