Honda s’aventure enfin dans le segment des roadsters néo-rétros de moyenne cylindrée en proposant la CL500 : une moto simple de conception, à l’esthétique épurée qui ne se gave pas d’électronique dernier cri et accessible au permis A2. De quoi encore prendre du plaisir à son guidon ?
Texte: Arnaud Dellicour – Photos Jonathan Godin – Un essai paru dans le Moto 80 #872.
Revenir à la base. À l’essentiel. À quelque chose de simple, facile de prise en main. Point de fioriture. Pas d’électronique à outrance. Pas de dalle TFT aux multiples menus. Pour faire cliché : juste un guidon, un cadre, un bloc, deux roues, un compteur minimaliste (trop et pas forcément lisible) et le tour est joué. Voilà ce que propose le constructeur nippon avec la nouvelle CL500. Enfourcher la demoiselle, c’est un peu comme monter sur son vélo, tant la simplicité est de mise, bien secondée il est vrai par une hauteur de selle relativement basse (790 mm) et une taille mannequin.
Esthétiquement, la japonaise ne manque pas de charme, elle qui puise son inspiration de la CL72 de 1962, surtout dans sa livrée « Candy Energy Orange ». Ne boudons pas notre plaisir, pour une fois que le choix des couleurs ne se limite pas seulement à du noir clair ou du noir foncé, avec un aussi flashy « Candy Caribbean Blue Sea » ou un plus sobre « Matte Laurel Green Metallic ». Voilà un beau petit scrambler qui claque, notamment avec ses jantes à bâtons (19’’ à l’avant), son grand guidon et son échappement placé haut : tous les attributs d’un vrai scrambler, en somme, même si hélas et pour raisons d’homologation, ledit pot a perdu la délicieuse finesse qui faisait le charme des machines d’antan… Consolons-nous en appréciant sa bande-son, respectueuse des autres mais joliment travaillée et enjouée.
Une certaine vivacité
Pour ébrouer la belle, clé dans le contacteur placé devant le bloc à gauche, comme sur la CMX500, une pression sur le démarreur et le bicylindre parallèle de 471 cm3 donne de la voix. Un moteur connu, qui fait ses preuves depuis 2013 sur la gamme des CB500, de la sportive R à l’aventurière X en passant par le roadster F, sans omettre le petit custom CMX dont notre scrambler fait plus que s’inspirer, partageant le même cadre, hormis pour la boucle arrière. De l’éprouvé donc, si ce n’est qu’il bénéficie ici d’une centrale électronique aux réglages spécifiques distillant des courbes de puissance différentes, privilégiant le couple : 43,3 Nm pour 46,6 ch. Les premiers tours de roues rassurent : nous sommes sur une Honda, donc sur une machine que nous avons l’impression de bien connaître dès la première prise en main. La position de conduite ne souffre pas la critique avec une hauteur de selle qui conviendra au plus grand nombre et un guidon idéalement calibré – large mais pas trop – pour garder le buste bien droit, le regard porté sur un horizon qu’il nous tarde de découvrir.
On aurait pu craindre qu’avec 192 kg affichés sur la balance tous pleins faits, le bloc peine quelque peu à mouvoir dynamiquement la demoiselle. Il n’en n’est rien. Vive au démarrage grâce à une démultiplication plus courte (une dent de plus à la couronne arrière), le bloc distille ensuite de chouettes perfs, en gardant à l’esprit qu’il ne cube que 471 cc. Même l’allonge n’est pas en reste. Vous croiserez aisément au-dessus de la vitesse réglementaire sur autoroute même si l’exercice ne présente aucun intérêt, tant la prise au vent est maximale – il n’y a aucune protection au vent – et que la moto n’est tout bonnement pas faite pour cela. Toutefois, soyons honnêtes, jusqu’à un petit 120 km/h, cela s’avère plus qu’acceptable… Néanmoins, évoluer entre 100 et 110 permet encore de prendre du plaisir, sans trop avoir le casque qui secoue dans tous les sens et sans forcément glisser en arrière sur la selle plate. À noter encore que la position de conduite ne souffre pas la critique malgré le petit gabarit de la moto. On l’a compris, son terrain de jeu à elle, ce sera la faune urbaine, le réseau secondaire et, éventuellement, les chemins de traverse, grâce à une garde au sol (155mm) et des débattements de suspension (150mm) corrects.
Deux, c’est mieux !
Plutôt menue, la CL500 se montre agile et joueuse, avec un comportement facile mais malgré tout rigoureux, bien aidé par la position de conduite idéale. Parfaitement équilibrée, la belle ne fait pas son poids donnant l’impression de conduire une machine plus légère. Les commandes se révèlent douces et participent à l’agrément de conduite. Seul au guidon, sur chaussée au revêtement en bon état, la CL500 offre un confort de bon aloi, bien campée sur ses Dunlop Mixtour. Sur route dégradée, le châssis de la demoiselle « vit » davantage. Les suspensions, tarées plutôt souples, privilégient le confort. Logique pour une moto plus taillée pour la balade que pour l’arsouille, couteau entre les dents. En duo par contre, et surtout quand le rythme s’accélère, on ne peut en dire autant, avec l’apparition d’un certain flottement. Sinon, malgré l’absence de poignée pour s’accrocher, des repose-pieds placés haut et vu le petit gabarit de la moto, le passager est plutôt bien accueilli.
En mode balade, vous apprécierez la douceur de passage des six changements de rapports mais vous constaterez rapidement le manque de frein moteur. Rétrograder d’un rapport ne suffit pas à ralentir réellement. Deux, c’est nettement mieux et ce n’est pas pour autant que vous passerez par-dessus le guidon ! Et tant qu’à parler freinage, avec un simple disque étrier deux pistons de 310 mm à l’avant et un unique disque à l’arrière de 240 mm, on peut aisément dire que le job est fait, tant en termes de puissance que de dosage. Et en cas de freinage appuyé ? Pas d’inquiétude à avoir, la moto ne déjauge pas et la fourche ne joue pas de l’accordéon. L’ABS à deux canaux est bien calibré, ne se déclenchant pas trop vite. On regrettera qu’il ne soit pas désactivable pour les sorties sur les chemins, facilitant le contrôle de la moto dans ces conditions spécifiques. Restons dans le chapitre « électronique embarquée » pour relever qu’elle se résume au minimum syndical, ce qui est plutôt une qualité pour une telle machine. Amateurs de connectivité smartphonesque, de modes de conduite multiples ou d’antipatinages aux variations sans fin, passez votre chemin et concentrez-vous sur le chemin, justement !
À propos de chemin, restons-y, sur le chemin : n’attendez pas d’un scrambler les prétentions d’un vrai tout-terrain. Ce qui était vrai en 1962 avec la CL72 reste encore vrai soixante ans plus tard : un scrambler n’est jamais qu’une routière déguisée en aventurière. Le contrôle est facilité par le grand guidon, la progression par une garde au sol optimisée et la position de conduite debout sur les repose-pieds reste envisageable malgré le fait que le guidon soit placé un peu trop bas dans ce cas de figure. Les grip-genoux facilitent le contrôle, mais l’échappement viendra rapidement gêner la jambe droite. Après, la limite d’adhérence sera donnée par les pneus, seuls arbitres en réalité des prestations off-road possibles…
Conclusion
À n’en pas douter, avec cette CL500, la marque nippone a réussi à proposer un joli petit scrambler bien agréable à rouler, complétant idéalement sa gamme 500cc. Cette CL se veut également un bel hommage à une génération de scramblers qui firent les beaux jours de Honda aux USA, mais dont l’Europe fut malheureusement privée. Le look apparaît plutôt sympa et flatteur, même si l’esthète déplorera une abondance de câbles, tuyaux et autres durites qui peinent à se dissimuler du regard. On retiendra plutôt une machine aux prestations équilibrées qui distilleront beaucoup de plaisir et de possibilités à son propriétaire. Idéale en ville par son gabarit mesuré, ses commandes douces, son moteur parfaitement calibré, sa maniabilité et son confort, elle apportera les mêmes satisfactions sur les départementales et ce, pour les mêmes raisons tout en procurant à son pilote les grands frissons de l’aventure quand il se risquera à quitter le bitume pour les chemins de traverse. Accessible à tous les gabarits et au permis A2, la CL500 ratisse large, de la débutante au grand tatoué revenu de tout. Sans prétention, elle attire même la sympathie sans se ruiner, tant à l’achat qu’à l’usage avec une consommation raisonnable et fera le bonheur des amateurs de personnalisation. Un succès assuré ! Et mérité…