HONDA CX 500, le rêve dessiné

Classic Thierry Dricot
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Certaines rencontres marquent le départ d’une aventure mais souvent, aussi, d’une amitié.  Et fréquemment, le monde de la bécane est le berceau des deux. Quand le designer Sacha Lakic a poussé les portes de la concession Honda de Mersch pour s’acheter un Integra, il ne se doutait sûrement pas de ce qui allait suivre…

Sacha Lakic est un designer reconnu qui multiplie les collaborations avec des grandes marques telles Mauboussin ou encore Roche Bobois. Cet artiste est aussi un passionné de mouvement et c’est donc tout naturellement que le monde de la moto l’a attiré, bien avant que sa carrière ne démarre. Actuellement résident luxembourgeois, il n’hésite pas à prendre sa bécane en fin de journée pour se faire une petite virée vers Esch-sur-Sûre, puis revenir sur Luxembourg pour écouter un concert de rock ou discuter avec des banquiers sans cravate en mal de distractions. Si son garage abrite quelques beaux véhicules, c’est surtout la Voxan Black Magic qui attire, à double titre, le regard, car c’est lui qui a dessiné cette pure merveille en 2004 pour la marque française aujourd’hui disparue. Thierry Avaux, de son côté, travaillait à l’époque de sa rencontre avec Sacha, dans le garage Honda de Mersch. Thierry vit, lui aussi, une longue histoire d’amour, parfois douloureuse,  avec la moto: pilote de vitesse, mécanicien, tourneur, fraiseur, peintre… Ce «touche-à-tout» de la mécanique et Sacha ne pouvaient que s’entendre. L’étincelle commune fut donnée par une vieille carcasse de Honda CX de 1982 qui trainait au fond de l’atelier. Sacha l’a dessinée, Thierry l’a construite en amenant aussi sa part de créativité dans le projet.

 

Page blanche

On ne peut pas dire que la CX 500 bénéficiait d’une réputation de guerrière. Son manque de punch et sa ligne peu «joyeuse» lui avaient même valu, outre-Rhin, le surnom peu flatteur de «pompe à purin»… C’était donc un vrai challenge que de donner à ce modèle un semblant de ligne et de performances. Nos deux compères sont donc repartis d’une page blanche. Le moteur n’a pas subi de transformations notoires en termes de préparation. Il a été démonté jusqu’au dernier boulon, remis entièrement à neuf, micro-billé et remonté. Tout ce qui n’existait pas a été fabriqué de toute pièce. Les moyeux de roues ont été tournés, par exemple, et les matériaux employés sont de tout premier ordre. Visserie en titane, fourche Marsocchi, amortisseurs Öhlins, étriers radiaux Nissin…

Finalement, après plus de 700 heures de travail, la vieille Honda renait de ses cendres pour devenir un objet juste magnifique, aux proportions parfaites et en harmonie absolue avec les canons d’un Cafe Racer. Avec 145 kilos sur la balance tous pleins faits, la pataude CX devient une petite machine diabolique et très efficace. La position de conduite sur l’avant donne envie d’attaquer en permanence et les qualités routières le permettent, croyez-moi! Légère, vive, dotée d’un freinage de premier plan, cette Honda est une machine à plaisir. Un véritable Cafe Racer fait et construit pour procurer des sensations bénéfiques à son pilote. Du fun au guidon sur les petites routes viroleuses à souhait du Luxembourg mais aussi à la terrasse d’un café branché du centre-ville où même les «costumes-cravates» au teint gris ne pourront s’empêcher de vous décocher un regard envieux.

25 pièces

Si cette transformation constitue indéniablement une réussite, nos deux amis ne comptent pas en rester là. Forts du succès rencontré lors des différentes présentations de ce prototype, ils viennent de décider d’en lancer une petite série de 25 pièces. Un premier client, acteur américain de son état, a déjà passé commande. Cette production dont le numéro 01 devrait être présenté au salon de Bruxelles en janvier prochain, sera légèrement revue par rapport au proto «00». Même si les performances actuelles du seul modèle existant sont plus que satisfaisantes, un effort particulier sera porté sur la préparation du moteur tout en lui faisant conserver un indice de fiabilité maximum. Pistons et bielles seront allégés, de même que le vilebrequin et le volant moteur qui bénéficiera, de plus, d’un équilibrage. Des arbres à cames racing feront leur apparition tout comme des carburateurs à boisseaux plats et les pièces de carrosserie telles que le réservoir et la selle seront en carbone. Ainsi revue, la brave CX n’atteindra plus que 140 kilos sur la balance avec les pleins. En vue du surcroît de puissance, on peut s’attendre à de sacrées performances.

Le nom final des machines n’est pas encore dévoilé et fera certainement l’objet de la surprise lors du lancement du premier modèle. Chaque modèle sera garanti et homologué au Grand-Duché de Luxembourg, ce qui permettra aux acheteurs belges et allemands d’immatriculer ce véhicule dans leur pays respectif. Même si cette production restera confidentielle, il est suffisamment rare de voir naître une nouvelle marque, fût-elle une descendante directe d’un des plus grands constructeurs mondiaux. Je sais, vous brûlez d’impatience de savoir à combien seront vendues ces merveilles. Quand on sait que rien qu’en pièces, il y en a déjà pour environ 30.000€, sans assemblage, que chaque moto sera construite à la main et numérotée, à 50.000€ l’unité, cela «fait des sous», comme on dit. Mais bon, cela fait une sacrée moto également! On navigue dans la haute couture, avec des productions signées d’un grand designer. Cher ou pas? À vous de voir!