Le goût du passé, c’est une chose que Triumph connait. Après la légendaire Bonneville, voici la Thruxton. Un pur Cafe Racer issu tout droit d’une soirée au Ace Cafe de Londres. Le sport ne rime pas nécessairement avec une débauche de chevaux et le plaisir simple d’une balade nez au vent avec des potes peut avoir une saveur inégalée.
Tout le monde n’a pas la dextérité ni la fougue créatrice des préparateurs et constructeurs présentés régulièrement dans les pages du Cahier Classic de Moto 80. Alors, quelle solution s’offre à ces amateurs de Cafe Racer? Il en existe une très simple: faire son marché chez les constructeurs qui proposent «en série» ce genre de motos! Fort de son histoire, Triumph a directement créé la Thruxton à partir de la Bonneville. Elle a notamment hérité de son bicylindre, avec quelques centimètres cubes de plus pour titrer à 865cc. Huit chevaux supplémentaires font culminer la puissance à 69ch, et un couple plus généreux, ainsi qu’une injection moderne sont les principales améliorations subies par le «twin». Une injection me direz-vous? Absolument. Cachée derrière de faux carburateurs pour garder la touche «rétro», la firme de Hinckley y a habilement dissimulé une injection, gage de démarrage facile et, surtout, d’un fonctionnement plus harmonieux. Look, quand tu nous tiens!
Accélérateur manuel
Le châssis n’a rien de révolutionnaire. Des tubes d’acier le composent et ces derniers se révèlent largement suffisants pour la vocation de la machine. Les roues à rayons sont davantage présentes pour le charme «old school» que pour une vraie raison technique. Une paire de commandes reculées, un guidon «moustache» pour la position de conduite, une petite bulle et un couvre-selle arrière finissent de donner le ton. Le modèle d’essai était affublé d’une double sortie Arrow (1.390€) qui permettait au bicylindre de donner de la voix. Et quelle voix! Peut-être un rien antisocial mais jouissif en plein. La finition générale est au rendez-vous et ne souffre d’aucune critique particulière. Pas de câbles qui pendent, des soudures de bon aloi, une peinture de qualité et une instrumentation simple mais lisible.
Le contact situé sous le phare à gauche est anachronique. Le démarrage ne pose aucun souci ; il se voit aidé non pas par un choke mais plutôt par un «accélérateur manuel», le temps que le moulin chauffe un peu. D’entrée de jeu, on trouve la position de conduite confortable. La selle moelleuse est accueillante et le guidon ne force pas à trop plonger vers l’avant. La moto se révèle légère et la ville pourra également devenir son terrain de jeu sans aucun problème. On ne peut pas dire que le moulin envoie du lourd mais c’est juste suffisant pour distiller de bonnes sensations sans jamais se faire surprendre par la puissance.
Tout son sens
Les mots d’ordre sont souplesse et plaisir. Sur les petites routes ardennaises, la Thruxton prend tout son sens. Enquiller les virages à allure soutenue, balancer la moto de gauche à droite, se servir du couple et profiter du son rauque aussi bien à l’accélération qu’en rentrant un ou deux rapports font de cette Triumph une bécane plaisir. Au fil de kilomètres, les premières impressions se confirment. Le confort est effectivement au rendez-vous, la légèreté de la moto participant grandement au peu de fatigue accumulée à son guidon. Le freinage – un simple disque à l’avant – s’acquitte de son boulot mais sans plus. Il se montre efficace si l’on tire assez fort sur le levier mais on pourra regretter l’absence d’un ABS auquel beaucoup de motards sont désormais habitués. Rouler en Cafe Racer oblige à faire certaines concessions. La place pour les bagages est assez limitée et démonter le couvre-selle avec une clef vous convaincra de rouler principalement en solo… Enfin, l’absence de béquille centrale vous fera pester lors des séances de tension et de graissage de chaine.
Mais ne vous trompez pas. Amateurs de performances pures, de freinage de trappeurs, d’angles où la limite est le coude, passez votre chemin! La Thruxton n’est pas faite pour vous! Par contre, si vous recherchez une moto plaisir aussi belle à regarder lors de vos pauses café qu’à emmener sur les petites routes ensoleillées, n’hésitez pas, cette machine vous procurera de belles sensations. Une moto attachante, pleine de caractère «rétro» et qui ne demandera qu’à vieillir dans votre garage, en attendant les sorties en solo ou entre amis. Tarifée à 9.990€, la Triumph se positionne comme une moto accessible, dont l’entretien et les consommables ne vous ruineront pas. Un billet d’entrée dans la légende? Avec la Thruxton c’est maintenant une réalité!
Un essai signé Thierry Dricot publié dans le Moto 80 n°775 de juin 2015.