Non, ces n’est pas du serbo-croate, mais les initiales qui estampillent la dernière version du scooter le plus rapide du monde aujourd’hui doté d’assistance à la conduite.
Dès la sortie de l’avion une bouffée d’air chaud m’envahit. La température frise les 40° et l’aéroport de Venise semble tourner au ralenti. Pas question de découvrir la célèbre lagune, mais cap direct sur l’usine Aprilia de Noale, à une vingtaine de minutes de là. Forts des remarques énoncées lors de la présentation de leur SRV 850, dont vous pouvez vous souvenir en consultant votre collection de Moto 80 et plus précisément le N°737 du mois d’avril, les responsables de la marque ont, en quelques mois, doté le plus rapide des scooters de la planète de l’ABS et de la Traction Control qui lui manquaient. Deux systèmes qui font l’objet de ma visite et celle de mes collègues.
Pas de couplage…
Notre journée débute par le traditionnel briefing. En quelques slides, on découvre que l’ABS est à deux canaux indépendants, l’un spécifique à la roue avant, l’autre réservé à l’arrière. Naturellement la première question est de savoir pourquoi un scooter comme la SRV 850, qui se veut le roi de la catégorie, ne dispose pas d’un ABS couplé. Silence embarrassé où l’on pense deviner qu’il s’agit d’un problème de prix à la production. A moins qu’il ne s’agisse tout simplement d’un délai de livraison. Il est bien évident que comme tous les fabricants, Aprilia ne construit pas lui-même les composantes du système qui sont l’apanage de sociétés comme Bosch ou Magnetti Marelli et indirectement de Brembo ou Nissin pour les étriers à triple pistons nécessaires. Vu la demande urgente d’Aprilia, peut-être que ces manufacturiers n’ont pu répondre dans les temps et que l’on se soit rabattu vers un système plus simple existant depuis longtemps. Autre possibilité, l’image sportive qu’entretient la firme de Noale et des ingénieurs tournés vers la compétition comme le confirme le mur érigé dans le musée-maison, reprenant tous les succès sportifs de ces dernières années. Des ingénieurs qui accordent sans doute une moindre importance à un frein arrière que leurs champions de la vitesse n’utilisent quasi jamais. Simple supputation…
Comme Max…
Par contre, il est évident que le système de Traction Control, baptisé ici ATC (avec un A comme Aprilia) est dérivé de celui qui équipe la Superbike de Max Biaggi. A la sauce routière et scooter s’entend, donc nettement moins sophistiqué, bien que la dernière version proposée sur le SRV permette le choix entre deux programmes.
En démarrant le bicylindre en V, le mode standard s’enclenche automatiquement. Dès que la différence de vitesse de rotation entre la roue avant et arrière est anormale, il coupe en partie l’allumage, mais d’une manière assez nette. Un témoin s’illuminant au tableau de bord vous avertit au cas où vous ne l’auriez pas senti.
Pour passer en mode Sport, vous devez glisser le curseur placé à côté de la poignée de gaz vers la droite, opération qui se traduit par l’apparition d’un marquage « sport » au centre du tableau de bord. L’ATC laisse alors un espace de manœuvre de 10% supérieur au mode précédent. Non seulement, il s’enclenche moins vite, mais il le fait aussi d’une manière plus modulable toujours via l’allumage.
Si vous poussez le curseur vers la gauche, vous retrouvez d’abord le système standard et, si vous insistez quelques secondes supplémentaires, vous enlevez complètement cette assistance à la motricité. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, choisir l’un ou l’autre mode n’a aucun effet sur la puissance du moteur et ne joue que sur la vitesse et la réaction du Traction Control, nullement sur la cartographie du bicylindre. Une cartographie d’ailleurs légèrement corrigée par rapport à la version testée en avril en fonction des nouveaux apports technologiques. Ne cherchez pas le bouton vous permettant de débrayer l’ABS, il n’y en a pas puisqu’il reste constamment enclenché.
Dans le fournaise vénitienne
Dur métier que celui de journaliste, alors que tout autour de moi les nombreux scootéristes se baladent dans la plus pure tradition italienne en short et Tshirt avec le casque comme seule protection, je m’affuble de ma veste Richa Spirit censée moduler la chaleur de mon corps avec son tissu nanosphère. Mais les 39° se font toujours sentir et, comme mes collègues, je suis heureux de prendre la route pour obtenir quelques bouffées de fraîcheur.
Derrière notre guide, nous attaquons de longs bouts droits entrecoupés de ronds-points, le tout sec comme une trique. De quoi découvrir qu’en position Standard, l’ATC se déclenche assez rapidement. Enfin, on le découvre via le témoin du tableau de bord car on n’a aucune véritable sensation physique de la chose. Par contre, vous découvrez qu’en sortie de virage, vous avez beau torcher la poignée des gaz, la puissance n’arrive pas instantanément. Il y a là un certain temps de réponse, le temps que l’ATC retombe à la normale. Naturellement, il aurait été préférable de tester ce système sur de bons vieux pavés belges légèrement humectés par une de nos draches nationales, mais si déjà sur cet asphalte sec le mode standard réagit, fatalement il le fera également dans des conditions moins propices à mettre un motard dehors.
Plus vif en Sport
A la vue des premiers virages des collines avoisinantes, le rythme du groupe s’accélère encore et il est temps de passer en mode «Sport». Une manœuvre facile qui se fait tout simplement en roulant. La route serpente idéalement pour tester ce type d’ATC. Il se déclenche nettement moins vite et revient à la normale nettement plus vite. On devine son action plus qu’on la ressent surtout que dans ce cas on oublie le temps de réponse perçu peu auparavant. On joue d’un virage à l’autre, d’une courbe à l’autre avec ce SRV qui, malgré son poids (250kgs) est vraiment maniable, précis et agréable à conduire.
Dur, dur…
Fatalement, au fil des bornes, on s’enhardit tous et le rythme ne fait que monter de plus belle, une occasion de tester l’ABS. Rappelons qu’il s’agit d’un ABS à canaux indépendants et si le système ne souffre d’aucune remarque à l’avant, je suis moins dithyrambique pour l’arrière. En effet, derrière, il a tendance à se déclencher plus vite et surtout en cas de gros freinages appuyés le levier gauche de sa commande devient dur, de plus en plus dur au fur et à mesure que vous insistez comme normalement vous devez le faire avec un ABS. C’est d’autant plus gênant que vous avez vraiment la méchante sensation que votre frein arrière perd toute son efficacité alors que votre main gauche retrouve la dureté d’un bon vieux frein à câble de jadis où il fallait poigner comme un forcené pour ralentir. Une sensation que l’on ressentait aussi à l’apparition des premiers systèmes du genre (rappelez-vous les secousses dans le levier ou dans la pédale de frein). Sans être un technicien pointu, je pense qu’il y a plusieurs raisons à cet effet. Sans doute le réglage d’enclenchement trop rapide qui donne une succession de réactions blocages/déblocages. Ce réglage a probablement été défini en fonction du transfert des masses assez important sur ce véhicule. D’ailleurs, pour cette version, le seeting de la fourche a été modifié par rapport à celle testée en début d’année.
Qu’en penser ?
Malgré ce petit inconvénient du frein arrière (peut-être relatif simplement aux modèles de pré-productions que nous avons testés), les présences de l’ABS et de l’ATC sont ces + que tout le monde attendait depuis la commercialisation du SRV 850. La Traction Control en mode Sport, celle que vous utiliserez normalement, ne module en rien les capacités et le plaisir de conduite de l’Aprilia. Elle offre, au contraire, un sentiment de sécurité supplémentaire. Surtout que la différence de prix est d’à peine 420€ par rapport à la version «sans». Ainsi, avec les 9.749€ réclamés à l’achat, l’Aprilia RSV 850 ABS-ATC reste toujours sous le prix ou au niveau de la concurrence.
Un essai signé Philippe Borguet et publié dans le Moto 80 n°741.