Trois machines distinctes, trois moteurs et cylindrées bien différents et trois tarifications que près de 2.500€ séparent. Vous avez dit comparatif? Oui, car l’esprit de ces BMW, Honda et Kawasaki est bien le même. Elles sont les dernières représentantes d’un segment aujourd’hui oublié par les constructeurs: celui des GT. En selle.
Pour vous offrir ce comparatif, nous nous sommes creusé les méninges. Pas facile, aujourd’hui, de trouver dans les catalogues des constructeurs de nouvelles (ou pas trop anciennes) GT Sportives. Vous savez, ces motos qui vous permettent de vous déplacer au quotidien, qui vous accompagnent en week-end et qui sont assez confortables pour prendre la poudre d’escampette lors des grandes vacances. Des motos sages, mais qui, de temps à autre, suivant votre bon vouloir et votre humeur, se réveillent sous l’impulsion de votre poignet droit et vous envoient une bonne bouffée d’adrénaline. Des trails (vrais ou faux), il y en a en pagaille. Des sportives, il en existe encore, fort heureusement. Mais des GT Sportives… nada! À croire que c’est une espèce en voie de disparition. La preuve: nous avons dû associer deux cylindrées – 800 et 1000cc – pour avoir trois machines à notre disposition. À la BMW F 800 GT, à la Honda VFR800F et à la Kawasaki Z1000SX, nous aurions pu aussi ajouter la Honda Deauville, mais on aurait encore eu une cylindrée supplémentaire, tandis que la Triumph Sprint ST est, avouons-le, en fin de carrière. D’ailleurs, elle n’était plus disponible auprès de l’importateur de la marque. Signe que la relève se prépare chez Triumph… Au départ, nous voulions aussi rester dans des tarifs homogènes, mais cela s’est avéré tout aussi laborieux. La Kawasaki de notre essai peut déjà crever certains budgets et la présence de la Triumph n’aurait fait que creuser la différence. Que dire alors des moteurs? Ici aussi, pas moyen de dégotter des machines à mécanique identique. Nous voilà donc avec un bicylindre, un 4 en V et un 4 en ligne. Mais finalement, tout bien réfléchi, ce n’est pas plus mal. Sans doute hétéroclite, ce comparo vous permettra de choisir laquelle de ces GT Sportives vous convient le mieux pour vous évader.
Coup de crayon
Esthétiquement, le plus beau design est signé Honda. Il a fait l’unanimité à la rédaction lors de notre journée photo. Pourtant, cette VFR800F ne nous avait pas particulièrement «scotchés» sur le catalogue ou au Salon, sur le stand Honda. Mais en «vrai», quand elle prend la pose à Durbuy, c’est autre chose. Le mariage entre l’héritage stylistique du modèle et une touche de modernité bienvenue est très réussi, notamment grâce à ses lignes désormais plus fines et à quelques détails du plus bel effet comme les clignotants incorporés aux rétroviseurs, l’optique en X avec feux à diodes à l’avant ou encore les feux arrière à diodes. Quand la VFR vous revient dessus et vous dépasse, ça claque! Seul point de discussion entre nos essayeurs: le silencieux, désormais simple, qui a quitté le dessous de la selle. Par rapport au modèle précédent, cette disposition permet à la VFR d’économiser 7kg, c’est un bon point. Mais esthétiquement, la ligne devient un peu plus banale sans cette particularité. Du côté des «verts», entre la première génération de Z1000SX et celle apparue fin 2013, les modifications du design furent vraiment mineures. L’un ou l’autre angle de carénage affiné mis à part, les véritables retouches concernent principalement les coloris et les valises, désormais nettement mieux intégrées dans la ligne de la boucle arrière. Mais nous reviendrons plus tard sur ces dernières. La Z1000SX reste une hybride. Entre les genres, son cœur balance, mais en définitive, elle tient toujours un peu plus du roadster que de la vraie GT. La BMW, par contre, ne peut cacher son ADN d’avaleuse de kilomètres cher à la marque. Et si l’on ne la déshabille pas du regard, il se pourrait que l’on ne remarque pas ses charmes cachés derrière un imposant carénage à l’esthétique vieillissante. Ou tout du moins dirons-nous au style vieillissant, car la F 800 GT a bien reçu un petit relooking en 2013. Disons que, face à la Kawa et à la Honda, la BMW se démode un peu plus vite.
2 ou 4 soupapes
Le V4 de 782cc de la VFR a gagné en onctuosité. Normal, il cache une petite surprise… Jusqu’à un bon 6.000tr/min, la distribution fonctionne en mode 2 soupapes. Et dès 6.900tr/min, deux autres soupapes par cylindre entrent en action sous l’influence du V-Tec. Avec ses 104ch, la VFR n’est pas une foudre de guerre à bas régime. Le couple n’a rien de colossal et les montées en puissance se font tranquillement, on peut souder la poignée sans risquer la crise cardiaque. En fait, le vrai punch du V4 n’est délivré qu’une fois la barre des 8.000 tours abattue. C’est donc vraiment haut dans les régimes que la Honda révèle une seconde facette de son caractère, beaucoup plus sportive cette fois. Car méfions-nous de l’eau qui dort! Menée à la cravache, la VFR est capable d’excellentes performances. Et si, en maniement sur un parking, la Honda pèse bien ses 240kg, en mouvement, cette masse se fait plus discrète. Le toucher de route est fin et la fourche avant, très précise, permet une remontée des informations idéale pour le pilote. Le freinage, désormais non combiné, mais avec ABS bien entendu, est confié à un double disque semi-flottant de 310mm et des étriers à 4 pistons à l’avant. C’est efficace, mais il conviendra d’empoigner fermement le levier de frein pour bénéficier d’un bon mordant. Quant au frein arrière, on le cherche toujours… À noter que le contrôle de traction, livré d’origine, ne possède que deux fonctions. Il peut donc être soit éteint, soit activé via une commande particulièrement peu esthétique placée au-dessus du demi-guidon gauche.
Rageuse à souhait
Par son moteur, la Z1000SX a mis tout le monde d’accord. Il est vrai qu’avec 142ch, on n’en attendait pas moins d’elle. Ne mâchons pas nos mots, la puissance délivrée est phénoménale. Rageur à souhait, le 4 cylindres de 1.043cc pousse comme un fou jusqu’à la zone rouge, sans discontinuer, sans jamais hésiter. Autant vous dire que, même en 3e, à ce stade, votre permis ne tient déjà plus qu’à un mince fil. Pas besoin non plus d’ouvrir le portefeuille pour changer le silencieux. Le bruit rauque distillé par le 4 cylindres est déjà très jouissif. Pour éviter d’être immédiatement taxé de criminel de la route, on appréciera donc le bloc Kawa avant tout pour son couple bluffant. Si, à 7.300tr/min, il délivre 111Nm, il permet de rouler et rouler encore sans jouer du sélecteur. Même à 1.500tr/min en 5e en sortie de courbe ou en agglomération, il ne semble jamais souffrir. L’électronique de la Kawasaki permet de choisir trois niveaux de contrôle de traction et deux de puissance (full ou low power). Le tout de série. En mode low power, le moteur abandonne 30% de sa puissance. Idéal, par exemple, lorsque les conditions de circulation se détériorent: pluie, feuilles… Si l’on aime accélérer comme un fondu, il faut aussi pouvoir s’arrêter. L’ensemble étriers Tokico radiaux 6 pistons et ABS s’acquitte de cette tâche avec la plus grande distinction. On en viendrait même presque à dire que le freinage est trop puissant. On entre immédiatement dans le mordant et, si l’on n’y prend pas garde, on risque de perdre en précision en entrée de virage. Le travail du châssis et des suspensions, par contre, s’avère beaucoup plus neutre, apportant confort et fluidité à l’ensemble. Attention tout de même, si vous aimez pencher (beaucoup), à l’arrière, la Z1000SX est équipée d’un 190mm. Vous devrez donc y mettre un peu du vôtre pour embarquer miss Kawa et ses 230kg au plus près du bitume.
Bonne à tout
Avec 798cc et 90ch sur la balance, la F 800 GT est bien entendu le petit poucet de ce comparatif. Inutile de lui demander de nous en mettre plein la vue comme la Kawasaki. Telle n’est d’ailleurs pas la philosophie de cette machine. Non, la F 800 GT, c’est un peu la François Mitterrand de ce comparatif: la force tranquille. Le bicylindre 4-temps de la F 800 GT est une véritable horloge, un poumon qui respire. Ce bloc s’apprécie d’ailleurs davantage pour son côté utilitaire que ses aspects ludiques. Même si sa plage d’utilisation est assez large – il reprend assez bas et allonge plutôt haut dans les tours –, on préférera le solliciter aux alentours de 3.000tr/min. En matière de vivacité, nous aurions bien voulu en recevoir un peu plus pour nous extasier un chouïa. Mais comme on vient de le dire, la F 800 GT, c’est celle qui trace sa route sans se préoccuper des autres! Le beurre et l’argent du beurre… jamais contents, ces motards! O.K., alors, parlons de ce qui nous a le plus emballés: une option (malheureusement, comme souvent chez BMW). La suspension pilotée ESA (Electronic Suspension Adjustment) réglable sur trois positions, «confort», «normal» et «sport», vous sera facturée 880€ avec le pack Safety. Un gadget de prime abord, mais une fois qu’on y a goûté, difficile de s’en passer… en Belgique! Car, parlons franchement, sur un asphalte propre et lisse, la différence entre les trois modes ne sautera pas vraiment aux yeux (ou plutôt aux fesses). Le mode confort pourrait même être perçu comme trop mou par certains. C’est en ville, sur les pavés, malheureusement sur l’un de nos trop nombreux axes défoncés ou en balade à deux, que le mode confort ravira de sa présence. Pour les autres usages, le mode sport a recueilli nos suffrages. Le changement de la phase de rebond du ressort arrière s’opère d’un clic de commodo, en une seconde. Ce qui permet de véritablement «jouer» avec l’ESA pour suivre de près la qualité du revêtement emprunté. Toujours en option dans le pack Safety, soulignons aussi le contrôle de sécurité automatique (ASC) qui empêche le patinage des roues arrière et qui, contrairement à l’ABS de série, peut se voir désactivé. BMW a également lié l’ESA et l’ASC à un moniteur de pression des pneus. Maniable, facile à conduire, prévisible, sécurisante, la F 800 GT pourrait être résumée en un mot: neutre. Elle est également équipée, de série cette fois, de la dernière génération d’ABS à deux canaux (dissociation de l’avant et de l’arrière), malheureusement gâché par un manque de feeling dans le levier.
Pour tous les styles
Après le moteur (donc les capacités à avaler les kilomètres à votre rythme) et avant les dispositions au chargement, le confort constitue le point le plus important d’une GT. C’est sans doute ici que nos trois machines affirment le plus leur différence de caractère. Et c’est encore plus flagrant lorsque, au cours de cet essai, nous passons d’une moto à l’autre… La BMW se révèle sans conteste la plus «GT» des trois. La position de conduite est bien droite, le buste forme pratiquement un angle droit avec les jambes et le guidon large invite le conducteur à se détendre. L’assise est très confortable et la protection très correcte tant au niveau de la bulle que des jambes. À son guidon, on peut à coup sûr avaler les bornes sans crainte de se fatiguer. Seul petit point gênant: une émanation de chaleur qui vient vous caresser désagréablement le genou gauche… Le tableau de bord, s’il est particulièrement complet, gagnerait à subir une cure de jouvence: c’est tellement sobre que ça en devient tristounet. Mauvais point également pour les rétroviseurs. Placés très en avant sur la bulle, ils nécessitent une gymnastique dangereuse (ou un bras particulièrement long) pour les régler en cours de route. En outre, les vibrations de cette même bulle parasitent légèrement la rétrovision une fois la moto en mouvement.
La position de conduite sur la VFR800F rappelle un peu celle des supersportives de la fin des années 90. Entendez ces sportives qui permettaient de rouler un minimum sans se «sinistrer» les genoux et les poignets. Néanmoins, il n’y a pas photo: des trois, la Honda est la plus fatigante et l’ankylose viendra si l’on ne s’amuse pas à se déhancher dans le sinueux, car les poignets sont «cassés» et les genoux remontent assez haut. Par contre, vu la position du corps très penchée en avant, à vitesse «élevée» sur l’autoroute, on profite des bienfaits de la bulle. Les rétroviseurs, dans ce cas, assurent parfaitement leur travail. Le tableau de bord à compte-tours dominant présente aussi deux écrans numériques sur les côtés. Toutes les infos nécessaires s’y retrouvent. Mais le passage d’un affichage à un autre est néanmoins fastidieux, il faut se pencher et appuyer sur un bouton du tableau de bord. Pour une GT moderne, on aurait pu s’attendre à bénéficier d’un commodo au guidon…
Enfin, la Kawasaki navigue un peu entre deux eaux. Son carénage est le plus léger, sa bulle n’est pas très grande non plus et sa position de conduite ressemble fortement à celle d’un roadster, c’est-à-dire que l’on est très légèrement penché en avant. C’est plus confortable que la Honda, mais nettement moins que la BMW. Au rayon du confort, on regrettera surtout les vibrations très présentes dans la selle dès que l’on dépasse les 6.500 tours. Soit une plage fréquente d’utilisation du moteur. Un inconvénient hélas pas vraiment nouveau de ce 1.000cc Kawasaki. Kawa a eu la géniale idée de prévoir une bulle réglable par le simple déclenchement d’une manette. Malheureusement, sa position invraisemblable au plus profond de l’intérieur de la bulle rend la manœuvre quasi impossible en roulant. Un comble! Très complet, le tableau de bord est par contre un modèle du genre et l’on accède aux fonctions d’une simple pression sur un bouton situé sur le commodo gauche du guidon.
Pour un week-end ou plus
Impossible de partir en week-end, voire en vacances, seul ou en duo, sans valises et/ou top-case, naturellement. Pour cet essai, nous avons donc équipé nos motos des options proposées par le constructeur. Car oui, ces «GT» se voient, de série, proposées «toutes nues». Dans le touffu catalogue des options BMW, le kit complet du parfait petit voyageur (supports de valises, deux valises, un top-case et les serrures) est proposé à 1.008€. Avec un volume total des valises d’environ 55l et un top-case capable d’embarquer un supplément d’environ 28 l, de nos trois motos, la BMW est celle que l’on peut charger le plus. Chez Honda, le set de deux valises latérales est à 794,99€. C’est plus cher, mais les valises sont un poil plus grandes, car leur contenance cumulée s’élève à 58l (2x29l). Une différence minime qui peut parfois se révéler salvatrice pour y loger un grand casque. Les valoches de Kawasaki peuvent, quant à elles, engloutir 28l chacune. Soit un total (56l) à peine moins élevé que chez Honda (-2l), mais un chouia plus important que chez BMW (+1l). A la suite du restylage 2013, elles ont tout de même perdu 7l chacune. Pourtant, contrairement à ce qui se passe avec la BMW et la Honda, avec elles, notre casque intégral XL de test entre! Uniquement grâce à des formes plus judicieuses? Oui… si les données fournies par les trois constructeurs sont rigoureusement exactes. Un bon point pour cette option, proposée à 800€ sur la Z1000SX. Si un top-case de 31l est aussi disponible chez Honda au prix supplémentaire de 471,90€ (avec dosseret), chez Kawasaki, vous pouvez en installer un… à condition de tomber les valises! Un choix délibéré de Kawasaki, qui ne souhaite pas dénaturer le côté sportif de la Z1000SX. Certes… mais pas très «GT» comme politique d’équipement. Heureusement, certains fabricants ont trouvé la parade. Et si le seul top-case peut convenir à votre bonheur, sachez que sa contenance est de 39l et qu’il vous sera cédé contre le supplément de 250€. Comme on le voit, pour embarquer votre matos de voyage, une petite allonge supplémentaire vous sera indispensable. Un détail à prendre en considération avant de demander votre chèque certifié à la banque. Avantage BMW sur ce round, mais mention spéciale tout de même à la Kawasaki.
Le juge de paix
Car quand on ne parvient pas à se décider entre l’un ou l’autre modèle, parfois, le portefeuille se charge de trancher à notre place de manière radicale. Et bien entendu, vu les techniques retenues, qui séparent assez radicalement les motos de ce comparatif, des différences financières sensibles se marquent sur la balance. Proposée à 10.850€ en version de base, la BMW F 800 GT est la moins chère des trois. La Honda suit d’assez près avec ses 11.990€. Le tarif de la Kawasaki, par contre, est plus salé: 13.199€. Ça fait quand même une sacrée différence pour quelques chevaux en plus… et pas mal de carénage en moins. Si l’on considère également la taxe de mise en circulation, une dépense à laquelle vous n’échapperez pas, l’écart en défaveur de la Kawa continue à se creuser. Forte de ses 142ch, sa première sortie du garage vous coûtera la bagatelle de 867€ si vous restez en «full power». Voilà, le cap symbolique des 14.000€ est dépassé (14.066€ très précisément). On arrive donc désormais à près de 2.000€ d’écart avec la Honda et plus de 3.000€ avec la BMW, puisque ces dernières acquitteront, respectivement, de 123€ et 61,50€ de TMC. Bien entendu, comme dit le proverbe: quand on aime, on ne compte pas. Mais si la Z1000SX est la moto qui nous a le plus emballés lors de notre sortie, si on rajoute tous les frais et que l’on n’a pas la chance d’être «full budget», force est de constater qu’on devra quand même un peu jouer de la calculette pour éviter les mauvaises surprises… Car penchons-nous aussi sur les moyennes des consommations de notre essai. La F 800 GT s’est contentée de 4,9l aux cent kilomètres. En vitesse stabilisée à 120km/h sur l’autoroute, vous resterez même sans peine sous les 5 litres. Une excellente nouvelle que cette belle frugalité. La Honda, avec ses 6,4l, s’est déjà révélée beaucoup plus gourmande pour une cylindrée semblable. Un litre et demi en plus tous les cent kilomètres, ça fait vite grimper la facture. Enfin, et ce n’est pas une surprise, avec son «mille», la Z1000SX signe la consommation la plus importante de ce comparatif: 6,6l de moyenne. Ça fait encore plus cher à la pompe qu’avec la Honda, mais en définitive, par rapport à la VFR, c’est un excellent résultat avec 261cc et 36ch de plus à nourrir. Ce chapitre est néanmoins enlevé par la BMW, car une différence à 4 chiffres sur la facture, cela s’étudie. Il ne vous reste plus à présent qu’à prendre tous les paramètres en compte – esthétique, usage avec ou sans duo, philosophie du moteur, finances –… et à faire le bon choix!
Un comparatif signé Laurent Cortvrindt et Philippe Borguet avec AB & BD publié dans le Moto 80 #765 d'août 2014.