Dans le segment des roadsters, la Z900 constitue un indéniable succès commercial. Dès lors, on peut légitimement s’étonner en constatant qu’avec cette version 2020, Kawasaki change fondamentalement de stratégie: désormais, la Z900 ne fait plus l’impasse sur les assistances électroniques. Explications.
Z750 en 2004, Z750S en 2005 et Z750R en 2011, Z800 en 2013 marquant l’arrivée du style Sugomi, Z900 en 2017 et Z900 «2.0» en 2019… le moins que l’on puisse dire, c’est que le roadster de moyenne cylindrée de Kawasaki évolue. Et pas qu’un peu! D’ailleurs, peut-on encore parler de moyenne cylindrée quand, en une poignée d’années, celle-ci a grimpé de 748cc à 948cc pendant que la puissance passait de 100ch à 125ch?
Conséquence: l’écart avec la Z1000 s’est copieusement réduit et les chiffres de vente ont clairement mis en lumière un résultat. Le public plébiscite très largement la Z900, partout en Europe. Pourtant, et ce dans la lignée de la Z800, la Z900 roulait jusqu’ici un peu à contre-courant. Entendez par là qu’elle n’embarquait aucune aide électronique à la conduite.
Se différencier n’est pas un mal. Les 32.000 exemplaires écoulés en 4 ans en Europe l’attestent. Les pilotes expérimentés et/ou sportifs peuvent légitimement préférer une machine davantage «brut de décoffrage». Une écurie forte de 125ch étant loin de les effrayer, un contrôle de traction, par exemple, ne s’imposera absolument pas comme un must lorsqu’ils devront choisir une moto. Alors que pour d’autres, au regard de ce que propose le marché, pour une somme d’argent similaire, le choix se porterait naturellement vers la moto la plus complète, à tous les points de vue, et donc également en termes d’équipement électronique.
Désormais, ce choix entre deux philosophies marketing, entre deux approches de la moto, n’aura plus lieu d’être: profitant de son passage à l’Euro 5, la nouvelle Z900 «fait le plein», à tous les étages.
Pour le marché
Mais Kawasaki ne craint pas de bouleverser sa clientèle, comme nous l’a expliqué Martin Lambert, European PR Manager chez Kawasaki Motors Europe NV. «Les nouveautés et les changements apportés sur ce modèle nous ont été suggérés par la presse internationale, à la suite des essais réalisés, ainsi que par nos clients. Nous avons enregistré les critiques, positives et négatives, afin de répondre aux demandes du marché. Par ailleurs, si la moto évolue, elle ne perd pas son caractère un peu brut de décoffrage: le passage à l’Euro 5 s’est révélé sans impact sur les prestations du bloc moteur».
En effet, le 4 cylindre en ligne de 948cc développe toujours 125ch, à 9.500 tours, et libère 98,6Nm, à 7.700tr/min. Dimensions, poids et volume du réservoir ne varient pas non plus ; par contre, ce modèle 2020 sera livré en Europe avec la selle «version haute» installée de série, c’est-à-dire une assise culminant à 820mm du sol. Mais pas de panique, grâce à sa partie frontale très fine, du haut de mon mètre quatre-vingts, mes deux pieds se posaient parfaitement à plat sur le sol. Et renseignement pris chez deux collègues bataves, le premier mesurant 1m72 et le second le dépassant de 18cm, l’assise semblait convenir à tous les gabarits. Dommage, par contre, que ses arrêtes se révèlent si dures pour le fessier.
Upgrade
Mais n’anticipons pas sur les impressions de conduite et passons en revue les nouveautés de ce «MY2020». Au niveau du design, notons surtout la face retravaillée ainsi qu’un éclairage désormais complètement à LEDs, à l’avant et à l’arrière (feux de croisement, de position, éclairage de plaque et clignotants).
Ensuite, le plus notable est évidemment l’arrivée du contrôle de traction, avec ses 3 niveaux d’intervention, ainsi que l’intégration de quatre modes de conduite: Sport, Road, Rain, Rider, dans cet ordre. Les trois premiers bénéficient de leur propre réglage de contrôle de traction (1, 2 ou 3) et de puissance (full ou low, le dernier délivrant approximativement 55% de la puissance maximale) tandis que le quatrième permet au pilote d’opérer son propre paramétrage, voire de couper le contrôle de traction. Pour changer les cartographies, on pousse sur deux boutons, vers le haut ou vers le bas, et les changements s’opèrent en roulant, même sans couper les gaz. Simple et rapide mais du mode Sport, par exemple, on ne peut pas pousser une fois «vers le haut», il faut obligatoirement pousser trois fois «vers le bas» pour arriver en Rider.
Un écran TFT signe également son apparition pour compléter cette touche de modernité inédite sur la série Z. D’une diagonale de 10,9cm, tout en couleur et s’adaptant automatiquement à la luminosité ambiante, il affiche les informations essentielles: affichage digital de la vitesse et du régime moteur, indicateur de rapport engagé, témoin de changement de vitesse, jauge, odomètre, deux trips, consommations instantanée et moyenne, autonomie, vitesse moyenne, temps de parcours, température du liquide de refroidissement, horloge, état de la batterie, indication du mode de conduite, témoin d’appels entrants et d’e-mails, témoins de Bluetooth et de conduite économique, ainsi qu’un rappel (réglable) de passage à l’entretien et de changement d’huile. Le tout clairement affiché et parfaitement lisible. Seul oubli: la température de l’air.
Enfin, en 2020, comment ne pas également ajouter à cet outil une connectivité Smartphone, même si pour le moment, mieux vaut utiliser un appareil Apple, le développement de l’application pour Android accusant un peu de retard au décollage…
Souple & puissant
Retrouver le fantastique 4 cylindres en ligne de Kawasaki constitue toujours un pur bonheur. Rond à tous les régimes, largement assez puissant quand il s’agit d’augmenter le rythme, rageur dans les tours avec une sonorité splendide, il a vraiment tout pour lui! Et puis quel plaisir: cette 3e vitesse, qui vous sort confortablement des épingles à 30km/h et vous propulse sur les lignes droites à plus de 130. Inutile de jouer du sélecteur à tout va!
Certes, ces vibrations dans la zone de la selle et du réservoir n’ont toujours pas été éliminées. Certes, la mise à jour des réglages de l’injection annonçait une accélération et une décélération plus souple. Ce n’est pas vraiment notre avis. Sur les bas régimes, la remise des gaz se révèle parfois un peu sèche et l’on observe de temps à autre quelques petits à-coups dans l’arrivée de la cavalerie. À notre étonnement, le mode Sport nous a paru en ce sens plus fluide que le mode Road. Mais tout ceci reste vraiment de l’ordre du détail car si l’on roule sur le couple, en «bon père de famille», tout se déroule dans la plus grande fluidité.
Rayon freinage, il n’y a aucune critique à formuler. Avant et arrière apportent grande satisfaction à nos yeux, avec un bon feeling et du mordant quand il le faut. Précisons que le levier de frein, tout comme le levier d’embrayage d’ailleurs, est réglable en écartement.
Niveau agilité, la Z900 se balance toujours aussi aisément d’un virage à l’autre, même si elle préfère les enchainements rapides aux lacets serrés et aux slaloms urbains. Kawasaki n’a, en effet, pas travaillé sur le poids de sa machine et nous restons persuadés que quelques kilos pourraient certainement être gagnés sur la balance. Même si, avec 212kg tous pleins faits, on ne peut pas parler de poids lourd pour sa catégorie.
Pour ce qui touche aux suspensions, on retrouve le même matériel que précédemment: à savoir une fourche inversée 41mm entièrement réglable et un Back-link horizontal, lui aussi réglable. Bilan: un très bon feeling du train avant, uniquement perturbé par les pneumatiques (voir encadré) et de la stabilité en courbe rapide tout comme sur autoroute à haute vitesse. En réalité, à part un manque de confort de selle (et encore, il s’agit d’un roadster), le seul vrai regret sur cette Z900, c’est de ne pouvoir compter sur un quickshifter, même en option.
À titre personnel, j’aurais également souhaité retrouver une couleur bien vive dans les 4 propositions, comme feu cette Z orange bien flash. Mais visiblement, mes goûts personnels sont loin de refléter le marché des ventes. Tant pis pour moi… Dernier point: la Z900 sera disponible en trois versions. Une «full power», une A2 70kw et une 35kw. À noter qu’afin de rencontrer les souhaits des clients, il sera impossible de différencier les 2 premières… sauf en se penchant sur le silencieux et en observant très attentivement le diamètre des embouts.
Conclusion
En 2017, notre article sur la Z900 pointait notamment l’absence d’aides électroniques à la conduite. Il est donc amusant de constater qu’aujourd’hui, la direction prise par ce modèle 2020 correspond à ce que nous avions mis en lumière. Et ce malgré le succès commercial qui n’a pas manqué d’accompagner la carrière de cette première version.
Comme on dit: qui n’avance pas, recule. Kawasaki l’a bien compris et suit donc la tendance générale en se mettant au diapason de la concurrence au niveau de l’équipement électronique. Son roadster phare conserve heureusement ses traits de caractère forts tout en limitant la hausse tarifaire au strict minimum: 400€. Pour un tel upgrade, c’est vraiment tout sauf du vol!
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Les up
– Sensible upgrade technologique…
– …à prix très réduit
– Bloc toujours épatant
Les down
– Selle dure
– Quickshifter non disponible
– Réponse à la remise des gaz
Prix de base: 9.599€
Consommation affichée: 6,7l/100km