Héritière d’une lignée vieille de plus de 40 ans, la légendaire « Z » de Kawasaki a fait rêver plus d’un motard. Depuis l’inoubliable Z900 de 1973 jusqu’aux dernières Z750 et Z1000, ces motos performantes restent des références dans leur catégorie. Aujourd’hui, la Z1000 SX s’est vue affublée d’un carénage et d’un qualificatif de « tourisme ». L’enfant terrible des roadsters peut-il se transformer en voyageuse ?
Affubler un roadster d’un carénage et lui donner l’étiquette de «tourisme» est un exercice que bien des constructeurs ont tenté. Réussir la greffe est une autre histoire. Beaucoup s’y sont cassé les dents. La recette est bien moins simple qu’il n’y paraît. Sur le papier en tout cas, la nouvelle Z1000SX laisse entrevoir un véritable travail de fond sur le sujet…
Tourisme stylé !
Esthétiquement très réussie, la SX trépigne sur sa béquille latérale pour que je l’emmène visiter les belles routes de l’arrière- pays andalou. Le carénage enveloppant est surmonté d’une bulle réglable en trois positions, les flancs laissent apparaître le bloc moteur et la finition générale semble parfaite. Tout est très bien assemblé. Les passages de câbles sont bien pensés et la qualité de la finition est à la hauteur de ce que réalise la marque nippone habituellement. Les rétroviseurs profilés, l’avant se tendant vers la route, le compte-tours gradué jusque 13.000tr/min avec une zone rouge à 11.000tr/min, des étriers radiaux de frein avant Tokico, le tout reposant sur une paire de Bridgestone Battlax MT016… Pas de doute, cette Z1000 SX a de la gueule ! Pensée pour attirer ceux qui, fatigués des sportives à outrance, ne veulent quand même pas «sombrer» dans le style «tourisme» habituel, cette machine a de nombreux atouts pour plaire.
Par rapport à une Z1000 normale, la marque a fait quelques aménagements notables. Au niveau du confort, on a déjà noté la bulle réglable en hauteur avec une différence de 9cm entre les deux valeurs extrêmes. Le réglage s’effectue à l’arrêt grâce à un poussoir situé sous le bloc instruments du tableau de bord. La selle pilote se voit s’épaissir de 10mm ainsi que la place passager qui gagne quant à elle 10mm en longueur, en largeur et en rembourrage. Le volume de rangement sous la selle est doublé par rapport à la Z1000. Le réservoir a gagné 4 litres de contenance portant le total à 19 litres permettant par la même occasion de prévoir des étapes de plus de 300km avant de ravitailler. Sa forme plus anguleuse permet de bien loger ses jambes afin de profiter de la protection du carénage. Les platines de repose-pieds sont montées sur silentblocs et participent au confort général. Le maître cylindre radial de frein avant est celui de la ZX-6R et les doubles étriers radiaux Tokico ne souffrent d’aucune critique. L’ABS sera livré en série. C’est un choix de l’importateur du Benelux. Le combiné amortisseur arrière ainsi que la fourche sont entièrement réglables.
Tirer plus long
Le quatre cylindres en ligne de 1.043cc à refroidissement liquide, double ACT et 16 soupapes est connu. Il affiche ici une puissance de 138ch avec un couple de 110Nm à 7.800tr/min. Alors que les corps d’injection inversés sont souvent équipés de cornets d’admission courts destinés à optimiser les performances à haut régime, ceux de la Z1000SX sont plus longs afin d’offrir la courbe de puissance la plus adaptée à la conduite en ville et sur route. Le diamètre d’admission de 38mm a été calculé pour offrir une réponse idéale à bas et moyens régimes. Un arbre d'équilibrage secondaire, entraîné par un pignon monté sur la 6e masselotte du vilebrequin, supprime les vibrations excessives.
Le système de refroidissement d’air alimente le moteur en air frais via des écopes situées à l’avant des flancs de carénage, limitant ainsi les pertes de rendement dues au réchauffement de l’air admis. Ce dispositif ne doit pas être confondu avec le Ram Air, où l’admission forcée comprime l’air entrant dans la boîte à air. Au niveau de la transmission finale, un couple 15/41 a été choisi contre 15/42 à la Z1000, ce qui fait tirer la 1000 SX un peu plus «long» et favorise le côté tourisme. Le cadre est composé d’une double poutre d’aluminium auquel le moteur vient se fixer en quatre points et devient par la même occasion un des éléments de rigidité de l’ensemble. On termine par la double optique et le feu arrière à diode tous très effilés et participant eux aussi au look de la machine.
Un moteur emballant
Il est temps de mettre le contact. Le quatre cylindres s’ébroue sans aucune difficulté, un son rauque sort des échappements et à la moindre sollicitation de la poignée de gaz, le compte-tours monte rageusement vers le rouge. Vous avez dit «tourisme» ? Les premiers mètres montrent une machine bien équilibrée, facile à emmener en ville avec un moteur très doux, souple et bourré de couple. La position de conduite est plutôt typée sport que grand tourisme. Néanmoins, mon mètre quatre-vingt huit est bien logé, le buste légèrement vers l’avant appuyé sur un guidon plus étroit de 10mm que sur la Z1000. Le combiné instruments privilégie l’information moteur avec un compte-tours bien visible. Un compteur de vitesse digital, une jauge à essence, deux journaliers et une montre viennent terminer le tableau. On peut regretter l’absence d’un graphe de la température moteur, ainsi que d’un indicateur de rapport engagé.
La route s’ouvre sur une belle trois voies au revêtement parfait. Quel que soit le régime de sollicitation des gaz, le moteur répond avec vigueur et «emmène» très fort. La puissance se libère de manière relativement linéaire, mais on perçoit une montée en régime plus rapide à partir de 7.000tr/min. Le rythme s’accélère et la machine se transforme peu à peu en chasseuse de chrono. Les trajectoires se tendent, la SX plonge avec délectation au point de corde sans broncher. Bien posée sur ses pneus, la Kawasaki prend de l’angle jusqu’au pose-pieds sans jamais broncher. A cette allure, elle est vraiment impériale et se calque tout à fait sur le «feeling» de sa sœur roadster, la Z1000. Cette machine est d’une efficacité redoutable. Les vitesses atteintes sont très vite au-delà du raisonnable. Les virages vous sautent au visage et les excellents freins vous poussent à retarder le moment où vous vous décidez à les actionner. Là, vous rentrez sur les freins et la machine reste imperturbable. La boîte de vitesses suit le mouvement et dès le deuxième rapport, les vitesses passent à la volée sans aucun à-coup. Nous voilà assez loin d’un essai d’une machine de «tourisme» tant la tentation est forte d’ouvrir «en grand» avec cette moto. On peut quand même mettre un bémol au comportement quand, en passant d’une version sans les valises à une autre équipée de celles-ci, on constate un flou de l’arrière sur des freinages « appuyés » et à partir de hautes (très hautes…) vitesses.
Route des vacances
En retrouvant un rythme normal, une allure de balade dominicale tranquille, l’ambiance change radicalement pour devenir plus feutrée, plus douce et finalement plus… touristique. Sans avoir les allures sénatoriales de certaines productions teutonnes, la Z1000SX devient alors une machine qui permet de voir plus loin que le bout de nos petites routes sinueuses ardennaises et même d’envisager ses vacances ou de longs week-ends seul ou à deux. La bulle réglable joue parfaitement son rôle et, en position haute, elle assure une très bonne protection. Au bout d’environ deux heures de route, le confort de selle affiche ses limites et vous force à effectuer un arrêt.
Au banc des défauts, on constate, à l’arrêt et pieds par terre, que le carter embrayage (côté droit) vient buter sur l’intérieur de votre mollet et vous chauffe très vite la jambe. Equipée de ses valises latérales, la machine devient moins stable mais aussi très large. Attention donc aux remontées de files. On se demande pourquoi les ingénieurs nippons ont «gaspillé» tellement de place entre la machine et les valises ? On peut regretter aussi l’absence de béquille centrale. Ce qui peut être handicapant sur une machine chargée, sans parler du casse-tête de la tension de la chaîne. Nous n’avons pas eu la possibilité de tester la protection de ce nouveau carénage et de sa bulle sous la pluie… De même, la petite taille du garde-boue arrière laisse augurer de belles remontées d’eau dans le dos du pilote.
Proposée dès janvier 2011 en trois versions (une version sans accessoires, une autre « city » avec le top-case et enfin une dernière «tourisme» avec les valises latérales), cette machine devrait attirer ceux qui « se calment un peu », ou ont décidé de voyager sans se priver d’arsouilles mémorables ou qui ont trouvé l’âme sœur pour partager leurs vacances à moto. Une machine qui ne laissera pas indifférente tant au niveau de son look, de son niveau de finition ainsi que de ses performances.