BMW R 1200 GS vs BMW R 1250 GS: faut-il craquer pour la nouvelle?

Essais Motos Laurent Cortvrindt
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Depuis la première R 1200 GS, présentée en automne 2004, BMW n’a pas cessé de faire évoluer son trail roi par touches successives. Parfois légères, parfois plus conséquentes, comme lors de l’apparition de la R 1200 GS LC, fin 2012. Cette fois-ci, la GS change ses chiffres pour devenir R 1250 GS, le reflet d’une sérieuse évolution moteur. Une étape décisive, importante au point de vous faire changer de monture? C’est ce que nous allons voir en confrontant la nouvelle à sa devancière…

C’est peu dire que la R 1200 GS marqua les esprits en succédant à la R 1150 GS lors de son lancement. La 1150 s’était déjà forgée une belle réputation, en digne héritière de la très réussie lignée GS. Avec 30kg de moins sur la balance et une puissance en hausse de 19% (100ch), la marge de progression était édifiante et le succès fut immédiatement au rendez-vous!

BMW tenait là une machine sans réelle concurrence, un état de fait que les Allemands entretiendront avec une application toute germanique en ne cessant de faire évoluer leur best-seller, gardant ainsi une belle longueur d’avance sur les éventuels poursuivants. C’est ainsi qu’apparaît, fin 2016, ce qui sera la dernière mouture de la R 1200 GS, pour le millésime 2017.

Au menu, un énième face-lift, ou plutôt devrait-on dire «latéral-lift» vu que les modifications esthétiques portent principalement sur les caches latéraux… Techniquement, la GS 2017 s’adaptait à la norme Euro 4 sans conséquence funeste pour la fiche technique, malgré un échappement et une cartographie moteur modifiés.

Autres améliorations apportées par ce millésime: un amortisseur de couple en sortie de boîte, une commande de barillet de sélection et des arbres de boîte modifiés. Cerise sur le gâteau, la R 1200 GS est aussi proposée en deux versions complémentaires: l’Exclusive, qui se veut plus «chic» avec sa déco spécifique, et la Rallye, prometteuse d’aventures avec des équipements plus orientés hors-piste. C’est une Rallye que nous allons confronter à la nouveauté du jour.

Ce qui change

Difficile, au premier regard, de reconnaître un millésime 2019 d’un millésime 2017. Rien ne semble les différencier et seule une observation attentive des couvre-culasses et des tubulures d’échappement, plus verticales, permettra de les distinguer à coup sûr.

Pour le reste, c’est chou vert et vert chou, hormis une indication 1250 barrant fièrement les flancs de l’habillage. C’est tout? Ah! Non, il y a aussi ces nouveaux étriers de freins, siglés BMW et non plus Brembo… Il semblerait que le constructeur allemand ait abandonné l’équipementier italien pour se fournir chez l’américain Hayes.

La nouvelle se distingue encore par sa cylindrée plus conséquente mais surtout par son système de distribution variable, baptisé ShiftCam. Résultat? Un bon 136ch au lieu de 125. Pas encore au niveau des cadors de la catégorie mais ça «commence à causer dans le poste»!

Ces chiffres sont obtenus par un système assez astucieux. Sur chaque arbre à cames d’admission sont taillées deux cames de profils différents pour chaque soupape d’admission. La plus courte autorise un meilleur remplissage à bas régimes tandis que la plus haute permet un passage des gaz plus généreux à hauts régimes. L’arbre à cames coulisse latéralement via deux axes commandés électroniquement, en fonction de la charge et du régime moteur.

L’ouverture des deux soupapes d’admission par cylindre est en outre légèrement décalée, ce qui provoque un tourbillon dans la chambre de combustion. Ceci améliore le remplissage et donc la combustion. La rondeur et l’agrément du flat devraient donc progresser grâce à un couple accru et une plus grande souplesse obtenus par cette admission variable.

Des chaînes dentées commandent à présent les arbres à cames en remplacement des chaînes à rouleaux, plus bruyantes. Parmi les autres avancées revendiquées par cette motorisation, notons encore l’injection de carburant à double jet, l’optimisation du circuit de lubrification, qui refroidit par la même occasion la base des pistons par jet d’huile, ou encore un système de détection du cliquetis qui adapte les réglages à un éventuel carburant à faible taux d’octane, de quoi envisager sereinement les expéditions dans les contrées les plus reculés de la planète. Et enfin, l’échappement en acier inoxydable se voit adapté pour exploiter les nouvelles caractéristiques du moteur équipé de la technologie ShiftCam.

Ce qui ne change pas

Des éléments demeurent-ils inchangés sur cette 1250, par rapport à la 1200? BMW se veut plus généreux et équipe d’office la dernière-née de l’éclairage full LEDs et du très réussi tableau de bord TFT ; deux options plébiscitées par la clientèle. Ce qui ne change pas, par contre, c’est toute la technologie embarquée, électronique en tête.

On ne va pas détailler ici ce qui est de série ou en option, il semble que de toute façon rares sont les GS qui sortent de concession sans être généreusement nanties en packs divers et variés. De nombreux modes de conduite sont proposés, des basiques Rain et Road aux Dynamic, Dynamic Pro, Enduro et Enduro Pro. Ces modes influent sur la réactivité du moteur mais aussi sur l’ABS, l’antipatinage et les suspensions électroniques ESA.

C’est ainsi qu’en mode Road, le moteur répond aux sollicitations avec une relative progressivité, l'ABS est calibré pour la conduite sur route et le DTC assure une parfaite motricité. Le mode Rain réagit plus doucement à l'accélérateur, tandis que l'ABS et le DTC prennent en compte l'adhérence limitée d'un revêtement mouillé. Le mode Dynamic répond directement à l'accélérateur, avec une légère glisse autorisée par le DTC. Avec l'ESA, un amortissement plus ferme sera implémenté par défaut. En mode Dynamic Pro, le pilote peut choisir par lui-même la réactivité des gaz et du DTC qu’il désire.

Le mode Enduro tempère la réactivité de la poignée de gaz, le DTC devient moins intrusif, autorisant des dérapages contrôlés de la roue arrière, tandis que la loi de l'ABS est adaptée au terrain meuble. L'ESA correspond bien sûr à un usage off-road. Avec l'Enduro Pro, le pilote choisit la réactivité des gaz, du DTC et de l'ABS, qui est désactivé à la roue arrière pour autoriser son blocage. Apparus en 2017 et reconduits sur la 1250, notons également l'aide au démarrage en côte «Hill Start Control» – pratique avec une machine lourdement chargée – et l'ABS Pro qui agit dans les freinages sur l'angle pour éviter le blocage de la roue ou le redressement intempestif de la moto.

Sophistication technique

Les suspensions optionnelles ESA dynamic de dernière génération ne changent pas. Le système adapte automatiquement et en continu l'amortissement en fonction des conditions rencontrées et de la conduite adoptée, corrigeant dans la foulée l'assiette de la machine grâce au bloc de capteurs de la centrale inertielle et aux capteurs de course avant et arrière. Les débattements en compression, les forces d'accélération et de décélération sont également prises en compte pour l'adaptation des réglages en continu.

À chaque mode de conduite sous-tend une loi d'amortissement mais celle-ci peut aussi être décidée par le pilote, qui peut privilégier l'amortissement Dynamic en mode Road, par exemple. Cet ESA Next Generation gère aussi la précontrainte automatiquement, réagissant de la sorte à la charge supportée par la moto.

Et si ça ne suffisait pas, le pilote peut encore intervenir en sélectionnant Min ou Max, pour réduire la hauteur d'assise ou, au contraire, assurer une précontrainte maximale qui augmentera la garde au sol. Difficile de ne pas trouver chaussure à son pied parmi ces multiples possibilités, pour autant que votre portefeuille vous le permette, puisqu’il vous faudra hardiment piocher dans les options pour obtenir la machine de vos rêves!

Ceci posé, la R 1250 GS n’apporte rien de neuf par rapport à la 1200, hormis ses 84cc complémentaires et sa distribution variable qui apportent un surcroît de puissance de 11ch. Est-ce suffisant pour vouer l’ancienne aux gémonies?

Affublé d’un «costume» parfaitement assorti à la Rallye, je me dévoue pour en prendre le guidon lors de la séance photo, et je retrouve avec plaisir cet incroyable ensemble de qualités qui font de la GS le succès que l’on sait. Tout est «picco bello», ou peu s’en faut! Les 125ch envoient du bois, se montrant particulièrement réactifs en mode Dynamic, qui durcit un peu au passage les réglages de suspension, rendant la GS spécialement tranchante. Du pur bonheur d’enquiller les kilomètres sur nos belles routes ardennaises!

Un peu trop d’optimisme? Pas de problème, le freinage couplé est là, qui veille au grain! Et s’il faut freiner en virage, ce n’est qu’une formalité avec l’ABS Pro, qui tient compte de l’angle d’inclinaison mais aussi avec le Telelever dont le principe sépare la fonction d'amortissement de la fonction de guidage de la roue. Le Telelever escamote donc les réactions parasites de la fourche conventionnelle, réactions qui ont tendance à redresser la moto au freinage.

Impériale

Bref, on peut taper dans les freins sans trop se poser de questions, d’autant que l’effet de plongée, et donc le transfert des masses, est lui aussi escamoté! Sur ce genre de machines, le Telelever, l’essayer c’est l’adopter… Malgré son joli petit costume Rallye, la GS ne sera pas celle avec laquelle j’aurai envie de faire le zazou dans la gadoue: sans pneus adaptés, no way! Et puis c’est lourd, beaucoup trop lourd pour que le commun des mortels puisse se faire plaisir, même s’il y aura toujours des forts des halles un peu pervers pour vous affirmer avec aplomb le contraire!

On ne risque pas le dépaysement en enfourchant la 1250. Tout semble identique hormis, dans ce cas-ci, le tableau de bord puisque le propriétaire de la Rallye avait fait l’impasse sur l’option écran TFT. Ici aussi se mesure un réel agrément: ce combiné donne un coup de vieux à la génération précédente. Plus grand que d’habitude, il reste lisible en toutes circonstances et ne vous assomme pas d’infos. Revers de la médaille, il vous faudra les afficher via les commandes au guidon.

Pas de surprise – ni de progrès! – au niveau du comportement, en tous points pareil sur nos deux machines. Oui, même au niveau des freins: nouveaux étriers, nouveau fournisseur mais pour un feeling et un rendu absolument comparables. Sans doute BMW a-t-il obtenu un meilleur prix mais rien à dire sur le résultat! Côté moteur, par contre, la différence est flagrante!

Si la 1200 «poussait» bien, la 1250 fait largement mieux! Elle pousse très fort sur toute la plage de régime, laissant dans tous les cas de figure (accélérations, reprises) la 1200 derrière elle. Plus étonnant, il est rigoureusement impossible de déceler le passage d’une came à l’autre: le procédé est parfaitement transparent. Largement plus puissant et volontaire, le ShiftCam, mais aussi plus agréable: le 1250 apporte plus de rondeur et d’onctuosité au flat BMW, qui s’accommode aussi bien des basses rotations sur un filet de gaz que des envolées vigoureuses à l’assaut de la zone rouge.

Une véritable réussite, immédiatement perceptible. Et nul besoin de privilégier le mode Dynamic: en mode Road, la réactivité à la poignée de gaz est idéale et le confort royal, la conduite s’apaise d’autant mais le rythme reste soutenu!

Conclusion

Cette confrontation directe des deux dernières générations de la BMW GS confirme la lecture de la fiche technique et l’observation statique: rien ne change, hormis le moteur. Faut-il dès lors craquer pour la 1250 et l’attrait de son flat?

Objectivement, non, sauf si votre GS est de plus ancienne génération et ne bénéficie pas encore de l’agrément des équipements décrits dans ce comparatif. La R 1200 GS la plus récente possède toutes les qualités routières de la 1250, et son flat largement assez de watts en toutes circonstances.

La 1250 en offre plus mais peut-être trop: n’oubliez pas à quel régime nous sommes soumis sur les nationales: 70km/h en Flandre, 80km/h en France, 90km/h ailleurs, et seule l’Allemagne permet d’enquiller de la borne sur autoroute à plus de 130km/h… Conclusion, les 125ch suffisent largement!

Par contre, et tant qu’à progresser, Monsieur BMW, si vous nous enleviez des kilos plutôt que nous rajouter des chevaux?

 

BMW R 1200 GS

Les up

– Formidable cohérence globale

– Parfaite transparence de l'électronique

– Simplicité d'usage

Les down

– Poids en TT

– Prix conséquent

– Restylage fort discret

Prix de base (à l’époque): 15.890€

Consommation mesurée: 5,3l/100km

 

BMW R 1250 GS

Les up

– Caractère moteur enthousiasmant

– Partie-cycle au diapason

– Technologies et équipements intelligents

Les down

– Prix confortable

– Options nombreuses et inévitables

– Poids & fiabilité mécanique à prouver

Prix de base: 16.960€

Consommation mesurée: 5,5l/100km