Ducati Hypermotard 950 & 950 SP: Version 4.0!

Essais Motos Arnaud Brochier
Partager

Le temps file aussi vite que les machines modernes et la Ducati Hypermotard évolue pour la 4e fois depuis sa sortie qui remonte déjà à 2007. Alors, quid de cette quatrième évolution qui voit sa dénomination augmenter, à défaut de sa cylindrée… Verdict après un double essai sur route et circuit.

Je m'en souviens comme si c'était hier! Nous sommes fin 2005 et sur la toile, des croquis d'un concept-bike Ducati qui ne ressemble à aucune autre machine commencent à se propager. Une moto aux allures de supermotard mais motorisée avec un bon gros twin de la marque dont l'échappement se caractérise par une double sortie sous la selle. Les rétroviseurs et les clignos sont positionnés dans le prolongement du guidon et le tout avance une sacrée gueule: l'hypermotard était née! 

Vu l'engouement du public, la moto sort d’usine début 2007 dans une version «Hyper», très proche du concept-bike. Son moteur, un 1.100cc refroidi par air, développe 95ch avec un généreux couple typique du bloc en L à 2 soupapes par cylindre. L'Hypermotard 1100 se verra d'abord commercialisée dans une version «S» suspendue par Öhlins. Mon sang ne fait qu'un tour: je la veux mienne dès sa sortie!

Deux ans et quelques milliers de bornes plus tard, je la vendrai. Mais je garde un souvenir ému de cette machine atypique avec laquelle je me suis beaucoup amusé. D’ailleurs, la roue avant a accumulé nettement moins de kilomètres que la roue arrière et c'est à l'équerre que j'abordais la majorité des ronds-points. Le freinage s’avérait démoniaque pour l'époque avec le montage d'étriers Brembo monoblocs M4 qui venaient de faire leur apparition sur la sportive 1098. Nous avions là les premières motos de production équipées d’étriers à montage radial. Niveau aide électronique au pilotage, par contre, c'était le néant total.

4 kilos de moins

Il faudra attendre 2013 pour que Ducati sorte une nouvelle génération d'Hypermotard motorisée par un twin refroidi par eau: l'Hypermotard 821. À l'annonce de la cylindrée, je suis un peu déçu mais heureux d’avoir le privilège d'aller l'essayer à Ascari. Le pire test de ma vie avec une bonne gastro qui m’a privé de sommeil et une pluie battante tout au long de la journée alors que je n’ai aucun équipement adapté. Un vrai cauchemar!

En 2016 suivra l'Hypermotard 939 et c'est encore «Bibi» qui s'y colle pour la présentation qui aura lieu sur le circuit de Castelloli. La pluie s’est à nouveau invitée toute la journée et, pour première fois, l’électronique m’évite une vilaine chute: je perds l'avant dans le dernier virage du circuit et l'ABS me sauve la mise in extrémis alors que je me voyais par terre.

Aujourd'hui, c'est sur l'île de Las Palmas, dans les Canaries, que Ducati nous présente l'Hypermotard 950. Je la surnomme hypermotard 4.0 en référence à sa 4e évolution mais aussi à la quantité d'électronique embarquée. Digne d'une Superbike! Comme la majorité des modèles de la marque, l'hypermotard reçoit une électronique de pointe comprenant centrale inertielle, ABS adaptatif sur l'angle, modes de conduites, contrôle de traction, contrôle des wheeling, poignée de gaz électronique, écran TFT couleur haute résolution, menus et commodos simplifiés et connectivité Bluetooth pour le Smartphone. Ne cherchez pas… tout y est!

Côté moulin, l'appellation 950 ne correspond pas à une augmentation de cylindrée alors que les 937cc de la version précédente (la 939, ne cherchez pas à comprendre!) sont préservés. En revanche, on note un boulot conséquent sur ce bloc qui perd 1,5kg sur la balance tout en gagnant 4ch et 1Nm. Si l'augmentation de couple s’avère quasi insignifiante, sa disponibilité est en nette hausse avec déjà 80% disponibles à partir de 3.000tr/min.

L'inertie des pièces en mouvement se révèle plus faible vu leur allègement et les montées en régimes devraient être plus viriles. Côté look et châssis, on peut parler d'un lifting complet pour un allure plus dynamique qui intègre à nouveau une double sortie d'échappement sous la selle. L'optimisation globale du châssis à permis de gagner 2,5kg et un total de 4kg a donc été gagné par rapport à la version précédente.

L'ergonomie a aussi fait l'objet de toutes les attentions avec un guidon élargi et une position de pilotage qui permet plus de déplacements sur la selle notamment vers la colonne de direction. Le type de pilotage «supermotard» (avec la jambe tendue à l'intérieur du virage) est donc accentué et les amateurs apprécieront. Côté freinage, on reste sur du sérieux avec des étriers Brembo M4.32 qui viennent pincer des disques de 320mm à l'avant. L'arrière n'est pas en reste avec un disque de 245mm pincé par un étrier double piston.

Danseuse de ballet

Comme à son habitude, Ducati décline son Hypermotard 950 en version standard et version SP. La principale différence se situe au niveau des suspensions. La version standard reçoit une fourche Marzocchi de 45mm de diamètre pour un débattement de 170mm alors que la SP reçoit une fourche Öhlins de 47mm de diamètre pour 185mm de débattement. Même combat pour l'amortisseur standard Sashs qui propose un débattement de 150mm contre 175mm de débattement pour l'amortisseur Öhlins qui équipe la SP. Avec ces valeurs, il est évident que l'Hypermotard n'est pas une moto adaptée aux petits gabarits puisque l'assise culmine à 870mm (890mm sur la SP). Court sur pattes avec mon mètre septante deux, je sais déjà que je devrai me tenir comme une danseuse en plein ballet lors des phases arrêtées!

Nous commençons par un essai routier dont le road-book donne le tournis. Ça va viroler sec et l’Hypermotard a été taillée pour cet exercice. J’aborde les premiers kilomètre en mode de conduite Touring mais j’avoue être déçu par le moulin qui se montre peu expressif. Une Hypermotard est un joujou extra pour faire le zozo et c’est bien sur le mode Sport que je la préfère. Comme à mon habitude, je déconnecte le contrôle de wheeling et je constate, un peu dépité, qu’il n’est pas possible de désactiver l’ABS sur la roue arrière. On s’en accomodera…

Le moulin est effectivement assez coupleux et il me rappelle la première génération, à la différence qu’il prend aussi des tours avec une belle allonge à la clef. Dès lors, deux modes de conduite sont envisageables: «j’enroule» sur le couple tout en gardant un rythme élevé (ou pas) et le «hooligan» quand chaque rapport est exploité jusqu’à la zone rouge. Vu la nature des routes et des lacets incessants, tout le potentiel de l’Hypermotard peut s’exprimer.

Le freinage ne souffre d’aucun reproche au même titre que les suspensions parfaitement calibrées. La position de conduite, fort sur l’avant, reste sans excès. Le grand guidon accentue la maniabilité: la principale qualité du châssis. Le confort n’est pas une priorité sur ce type de machine et j’ai trouvé la selle un peu trop rigide mais «sans plus». Après une centaine de kilomètres, nous ramenons les bécanes au circuit et je suis vanné! Enchainer autant de virages serrés dans un contexte montagneux demande une concentration de chaque instant et je ne suis pas mécontent de faire une pause déjeuner bien méritée.

Limite de fous

L’après-midi est dédié à un essai sur le sympathique tracé de Maspalomas qui a des airs de mini Phillip Island avec le bord de mer à quelques mètres des vibreurs. Pour cet exercice, nous utiliserons la version SP affublée d’une ligne complète Termignoni (+6ch) et d’un amortisseur de direction Öhlins, tous deux optionnels, malheureusement. Équipés en conséquence, nous prenons la piste qui est assez particulière. Nombreuses épingles, chicanes bien prononcées, la maniabilité de l’Hypermotard est sollicitée au maximum.

Après le premier run, j’ai déjà ma petite idée sur le réglage des suspensions, pas optimal sur circuit… puisque calibré pour la route. Chose rare, je dois freiner la détente de l’amortisseur et de la fourche alors que la moto me saute à la figure lors des changements d’angle. Chose moins rare, je dois aussi freiner la compression avant et arrière pour atténuer les transferts de masse. Je repars en piste et me voici déjà nettement plus serein.

La moto,  trop agile auparavant, se montre à présent beaucoup plus stable dans toutes les phases de pilotage. Le rythme augmente, on peaufine les trajectoires et je finis par trouver les limites du train avant dans une épingle où je perds l’avant sans chuter. J’ai pris un peu beaucoup (trop) d’angle, pas assez déhanché et je me retrouve sans sélecteur de vitesse: sorry chef… j’ai glissé! Le staff me met immédiatement une nouvelle moto à disposition et c’est gaz en grand que je reprends la piste où mes petits camarades m’attentent pour les hostilités «amicales» de circonstance.

Cela fait trois semaines que je n’arrête pas de dire que j’ai froid en Belgique mais là, je sue des litres et je meurs de chaud. Le tempo est sportif et le restera durant le dernier run avec un pilote italien qui me pousse dans mes derniers retranchements. Je sens sa roue avant à quelques centimètres de mon arrière et je dois tout donner pendant 5 ou 6 tours pour qu’il reste bien là où il est. On est à la limite mais on s’amuse comme des fous devant le staff qui se délecte du spectacle. Le drapeau à damier s’invite en rabat-joie, fin de la journée.

Conclusion

L’Hypermotard 950 est une moto ludique, construite pour le fun en toutes circonstances. Si la 939 s’était un peu éloignée du concept de base, la 950 retrouve 100% de l’ADN du modèle initial pour notre plus grand bonheur. Puissante mais pas trop, d’une agilité déconcertante et dotée d'un look particulier, c'est une moto pas comme les autres qui dénote un peu dans le paysage motocycliste. Et ça fait du bien!

Version SP

Comme vous l’aurez compris, la Ducati Hypermotard 950 est disponible en deux versions, dont une SP richement équipée. Tarifée à 16.290€, elle vous propose:

– des jantes Marchesini en alu forgé,

– des suspensions Öhlins avec débattement supérieur (fourche +15mm et amortisseur +25mm),

– un quickshifter up & down,

– des pièces en carbone,

– un poids allégé de 2kg,

– une selle à 890mm, soit 20mm de plus que la version standard.

Les up

– Agilité du châssis

– Agrément moteur avec couple et allonge

– Suspensions de qualité bien calibrées

Les down

– ABS non déconnectable sur la roue arrière

– Hauteur de selle

– Prix premium

Disponibilité: immédiate

Consommation annoncée: 5,1l/100km

Prix de base: 12.490€