Triumph Tiger Explorer XCa «Achtung Explorer!»

Essais Motos Philippe Borguet
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La nouvelle Triumph Explorer joue résolument mais avec simplicité la carte de la technologie compliquée. Six versions aux exécutions et aides à la conduite différentes sont proposées.

J’ai eu peur. J’ai eu très peur. À l’issue de la conférence d’introduction, je craignais le pire. D’abord je pensais être retourné sur les bancs de l’école et, plus précisément, au cours de maths qui n’était pas mon fort (mais y avait-il un cours qui était vraiment mon fort?).  Le patron de Triumph ne cessait de décliner des X dans toutes ses formules: XC, XCx, XCa, XR, XRx, XRt… autant d’équations qui me paraissaient aussi insolubles que jadis. Heureusement, il désignait les différents types de cette Explorer que nous étions venus découvrir et tester sur les routes de l’Algarve, à la pointe de l’Europe. Pour faire simple, la XR et ses roues à rayons est la version off-road de la XC reconnaissable à ses jantes à bâtons. Les autres appellations étant des déclinaisons de finition plus sophistiquées les unes que les autres. Voilà qui était déjà plus clair dans mon esprit… mais je n’aurai jamais dû boire ce vin de Madère au cocktail d’ouverture car la suite allait se révéler plus terrible encore avec l’énumération des aides à la conduite dont disposent ces versions 2016 et surtout, les possibilités multiples de réglages permises! Nos interlocuteurs avaient beau nous certifier qu’une fois en selle ces sélections ne seraient pour nous, grands gosses, qu’un jeu d’enfant ; l’assemblée restait sceptique… Pensez donc, une heure d’explications théoriques ne pouvait déboucher que sur du compliqué. Eh bien… non! Force m’est de reconnaître que Triumph a transformé ce «compliqué» en «simplicité». Mais ne brûlons pas les étapes, versez-vous un verre de Madère et sirotez le délicatement en passant ces innovations point par point. Signalons toutefois que tous les modèles X ne sont pas logés à la même enseigne et que nous parlons ici de l’Explorer la plus sophistiquée, la XCa disposant de l’entièreté de ces nouveautés technologiques.

 

TSAS, des suspensions semi-actives

En collaboration avec WP, Triumph a développé fourche et amortisseur à commande électronique. Vous pouvez ainsi durcir ou ramollir vos suspensions entre «Sport» et «Confort» en sélectionnant 9 positions différentes. Vous pouvez aussi opter pour une fonction «Auto» ou «Off-road». En fait, on joue sur les clapets internes de passage d’huile dont le niveau d’ouverture permettra d’ajuster compression et rebond. Si les différences entre des positions proches ne sont pas très perceptibles, on sent une réelle et nette différence si l’on passe du haut vers le bas de l’échelle, par exemple directement de Sport à Confort. Dans cette dernière option, les bosses et petites aspérités des chaussées se font complètement oublier comme jamais je ne l’ai ressenti, tout en évitant d’avoir une moto bondissante lorsque vous attaquez un peu. Par contre, dans cette position confortable, le transfert des masses sur l’avant est nettement plus sensible lors des freinages appuyés, l’Explorer ayant tendance à s’écraser davantage qu’en option Sport, ce qui n’est que normal. Ajoutons que les sélections s’effectuent simplement et, surtout, rapidement sans délai d’attente, ce qui ne sera pas le cas d’autres fonctions, comme nous le verrons ci-après.

 

ABS, TC, inclinaison en courbes

Bien entendu, les Triumph Explorer sont toutes dotées de l’ABS mais certaines poussent le bouchon un peu plus loin. L’ABS standard, sélectionnable en modes «Route», «Off-road» ou complétement déconnecté, est aussi jumelé à un capteur des divers angles que peut prendre une moto. Ainsi, il tiendra compte de l’inclinaison de la machine pour agir plus ou moins fortement. C’est intéressant pour ceux qui, comme moi, conservent un certain freinage en entrée de courbe. Si vous optez pour le mode «Off-road», l’ABS ne travaillera plus que sur la seule roue avant, laissant ouvert un possible blocage de l’arrière comme parfois demandé par le pilote pour mieux placer sa moto sur les appuis du terrain. Ce capteur d’angle intervient également au niveau du contrôle de traction. Celui-ci propose cinq modes différents, soit «Sport», «Route», «Pluie», «Off-road» ou complétement déconnecté. Il s’adaptera automatiquement en fonction de l’angle et de l’adhérence.

Fatalement, on retrouve aussi un choix en mapping moteur avec, en prime, une possibilité pour le pilote de définir ses propres exigences en fonction de sa conduite.  Tout en conservant la même puissance, soit 139ch à 9.300tr/min, le choix du mode moteur entre «Autoroute», «Route», «Route sinueuse» ou «Pluie» amène automatiquement une reconfiguration des réactions de la suspension et de l’ABS. Seule la fonction pluie provoque une diminution de puissance à 100ch. Si vous ajoutez à cela une poignée de gaz ride-by-wire, un démarrage en côte via le levier de frein avant, un cruise control, un retour automatique des clignotants, des sensors pour la pression des pneus, une bulle maintenant commandée électriquement, des poignées et selles chauffantes indépendantes,  une prise USB, une autre en 12V, vous comprenez aisément que je suis sorti de cette réunion d’informations avec une tête comme un melon et la crainte de patauger comme un papy dépassé par cette débauche de technologie moderne!

 

Vers le bout du bout de l’Europe

Dans leur robe bleu Lucerne, les Explorer XCa nous attendent sagement alignées. Si l’aspect général n’a guère changé, on remarque néanmoins directement le nouveau dessin de la bulle électrique et celui de la selle annoncée comme plus confortable (ce qu’elle est) tout en proposant toujours deux hauteurs d’origine (837mm ou 857mm). Le moteur est peint couleur titane et souligne ainsi le soin apporté à la finition en général, à l’image des nombreuses pièces badgées Triumph. L’ensemble conserve sans doute un aspect massif dû aux formes du réservoir de 20l mais, surtout, des caches latéraux camouflant un nouveau radiateur tout en assurant la protection du conducteur. Néanmoins, malgré cette impression de volume devant vous, les genoux trouvent naturellement leur place et le cintre du guidon tombe bien en main. Par contre, le silencieux d’échappement est fortement réduit. Pourtant, ce n’est que grâce à lui que ce fabuleux 3 cylindres de 1.215cc répond aux normes Euro4. Et c’est grâce à lui également, aux dires de l’usine, que la consommation a chuté de 5% tout en amenant un petit surplus de puissance et de souplesse. Son ronronnement ne gâche rien et augmente acoustiquement le plaisir de vos montées en régime. En enclenchant la première, on constate d’emblée que les 30% d’efforts en moins à fournir sur le levier d’embrayage sont bien réels. Très vite, je suis aussi conquis par une boîte six vitesses qui passe comme dans du beurre avec absence totale d’à-coups dans la transmission à cardan. Un sentiment valable aussi pour les freins assurés efficacement par des Brembo radiaux. C’est en consultant la fiche technique que je me suis rendu compte que cette version de Tiger Explorer frôlait quand même les 280kg en ordre de marche! Cela ne se sent aucunement, ni en roulage et à peine en manœuvres.

 

Off-road limité

C’est donc avec plaisir que je retrouve les agréables sensations de ce trois cylindres, même, si très vite au vu de l’humidité régnante sur les routes sinueuses de l’arrière-pays, j’opte pour un mapping «rain» me convenant parfaitement. Quelques gouttes de pluie arrivent et c’est le moment de me lancer dans le changement de hauteur de la bulle. La simplicité de l’action me stupéfie. Tout se joue avec le commodo gauche: avec le bouton A (appelons-le ainsi), vous amenez la sélection de votre écran digital sur l’icône de la bulle, avec l’appel de phare vous confirmez, avec les flèches up/down du bouton A vous définissez la hauteur de votre bulle et vous confirmez avec l’appel de phare. La procédure est identique pour la suspension semi-électronique, pour déconnecter l’ABS ou choisir le type de contrôle de traction désiré. En fait, les choses se compliquent un peu et demandent davantage de temps pour modifier le mapping du moteur. Il faut d’abord changer les indications de l’écran digital, ensuite couper les gaz, faire fonctionner le bouton A et l’appel de phare avant d’attendre que l’ABS, le contrôle de traction et la suspension se paramètrent en fonction de la cartographie choisie. Ce n’est pas aussi instantané que la mise en place du pare-brise. Ainsi, pas question de jongler avec la commande pluie si vous abordez une route sèche avec des plaques d’humidité. C’est le seul point négatif d’un système qui, je l’avoue, m’a agréablement surpris de par sa simplicité.

La version XCa est destinée aussi à s’égarer en dehors de l’asphalte.  Gardons néanmoins les pieds sur… le macadam. Les escapades hors routes sont limitées aux chemins roulants, si possible secs. Dans notre programme du jour, une partie off-road était prévue mais les pluies de la nuit l’avaient rendue bien glissante. Vu l’espace entre le garde-boue et le nouveau Metzeler Tourance, très convaincant sur l’asphalte, la boue aurait eu vite fait de bloquer la roue avant. On s’est donc contenté d’un large chemin empierré. De quoi néanmoins confirmer le bon équilibre général déjà ressenti sur la route. Les sélections off-road de l’ABS et du mapping moteur font en sorte que l’on garde constamment une belle traction. Des sélections qu’il faudra néanmoins réactiver si vous coupez votre moteur.

 

Conclusion

Lors de la bataille d’Angleterre, les pilotes allemands de la Luftwaffe avaient l’habitude de lancer un «Achtung Spitfire» quand les avions de la RAF déboulaient des nuages. Je suis convaincu que les ingénieurs munichois pères d’une certaine GS vont devoir lancer un «Achtung Explorer» quand les 6 versions de cette Triumph débarqueront sur nos plages au printemps prochain. Avec son moteur toujours aussi vivace mais capable de reprendre en 6e à moins de 2.000tr/min, avec une tenue de route encore améliorée – notamment grâce à un meilleur ressenti, la légèreté de l’avant et une position du pilote 20mm plus proche de la tête à bille –, avec une répartition de poids judicieuse, l’Explorer se présente comme une sacrée alternative à la machine allemande. Surtout que dans la configuration de notre machine d’essai, avec toutes les aides à la conduite signalées ci-avant mais aussi les poignées et selles chauffantes indépendantes, des repose-pieds en alu, des protection de moteur et du radiateur, des rails de fixation des valises et les feux antibrouillard, la version XCa est proposée à 19.500€!

 

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De nombreux accessoires

Outre des vêtements spécifiques à la gamme Explorer, vous pourrez personnaliser  votre XC ou votre XR via de nombreux accessoires. D’abord au niveau de la bagagerie (2 choix possibles), du silencieux d’échappement (un Arrow est prévu), de la sellerie (version basse de 785mm à 805mm ou version plus rembourrée) et même du pare-brise modèle haut.