Commémoration – Revolution Road

Balades à moto Tourisme P.Bonamis J.Berghmans
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Quarante-cinq ans après mai ’68, nous ne pouvions ignorer ce tournant majeur de l’histoire du XXe siècle. A leur manière, les BBB commémorent cet événement en parcourant des routes magnifiques joignant différents lieux qui ont été le théâtre des luttes sociales importantes, et même de révolutions au cours des trois derniers siècles. A vos drapeaux rouges, à vos fourches, à vos calicots… Euh non! Tous en selle pour remonter le temps, agréablement, et en paix en ce mois de juin.

Le point de départ de cette BBB est facile à trouver: la place Saint-Lambert au cœur de Liège. Le centre historique de la Cité ardente sort de 30 ans de travaux. Les piliers métalliques symbolisent l’emplacement de l’ancienne cathédrale qui fut détruite par les révolutionnaires en 1794. Nous profitons de l’endroit pour admirer le Palais des Princes-Evêques. Ce que l’on voit est une reconstruction datant de 1536. Siège de la Cour d’Assises, l’endroit a servi de prison, d’entrepôt ou d’hôpital après 1794. La première cour est accessible à tous. Nous prenons nos motos pour sortir de Liège en passant par le quartier Sainte-Marguerite. Jusque dans les années ’60, l’endroit était particulièrement vivant et animé. De nombreux commerces attiraient une vaste clientèle. La percée de l’axe de liaison entre la E25 et Liège a complètement défiguré l’endroit qui a perdu son âme d’antan. 

Autonomie wallonne

Au carrefour de Fontainebleau, ancien charbonnage de Bonne-Fin, nous découvrons une statue en hommage aux gueules noires qui ont fait Liège et la Wallonie. Nous grimpons vers le quartier Saint-Nicolas sur les hauteurs verdoyantes de la ville. La vue sur le dôme de la basilique est surprenante. Nous redescendons vers les bords de Meuse à Sclessin et passons devant le célèbre «Chaudron», le stade du Standard de Liége. On enjambe la Meuse pour atteindre Ivoz-Ramet. C’est ici, en 1960, que des revendications autonomes et fédérales pour notre Wallonie se sont clairement exprimées lors des célèbres grèves ouvrières, notamment par le canal du Mouvement Populaire Wallon créé par le syndicaliste André Renard. L’endroit est redevenu à présent calme et paisible. Les jolies routes nous attendent. Nous rejoignons le plateau à travers bois par la sympathique N639 tout en courbes, jusqu’à Neuville-en-Condroz. Si la sortie de Liège reste marquée par l’industrie, nous profitons ici de routes splendides. Que du bonheur sur tranches… de pneus. Un passage par Villers-aux-Tours nous fait repenser à notre série de l’été dernier qui rejoignait tous les Villers de Belgique (itinéraires toujours disponibles sur moto80.be). Nous poursuivons avec de nombreux virolos entre Hody et Anthisnes. Nous jetons un œil à l’Avouerie (goûtez l’agréable «Cervoise de l’Avouerie d’Anthisnes») avant de rejoindre la vallée de l’Ourthe à Comblain-au-Pont. On emprunte le Quai du Vignoble. Saviez-vous que la rive gauche de l’Ourthe et la rive droite de l’Amblève étaient jadis plantées de vignes? Ces deux coteaux étaient protégés des vents du nord et assez généreusement ensoleillés. Nous aurons l’occasion de revenir plus longuement sur le vin en Wallonie, une histoire passionnante, dans le cadre d’une prochaine BBB…

Valeureux carriers

Nous traversons l’Ourthe puis l’Amblève pour remonter vers Fraiture et Presseux. Nous quittons la vallée pour nous retrouver à Sprimont. Encore un lieu de révoltes populaires. En 1886, les carriers de la localité tentent d’obtenir des conditions de travail moins inhumaines. Le salaire de 35 centimes de l’heure permettait à peine de survivre. Le pain coutait 31 centimes, presque l’équivalent d’une heure de travail. Les grèves massives de 1886 ont laissé des traces puisque, suite à ces mouvements, le travail des enfants de moins de 12 ans a été interdit ainsi que les travaux souterrains aux femmes de moins de 21 ans. Les carrières de Sprimont ne sont plus des hauts lieux de luttes ouvrières. La machine a largement remplacé l’homme. Sprimont peut s’enorgueillir de belles réalisations comme la fontaine de la… Place Saint-Lambert, point de départ de cette balade. Le Musée de la Pierre est installé dans l’ancienne centrale électrique des carrières Van Roggen. Les Sprimontois peuvent être fiers de leur passé. La route reprend ses droits. Direction Aywaille, à présent, pour aller retrouver l’Amblève pendant quelques kilomètres. Nous quitterons le sympathique cours d’eau pour remonter vers Chevron. Nous empruntons la «Road Sixty-Six» d’«émon nos-ôtes», la N66, qui s’avale vertement. Une succession de petites routes nous ravit vers Arbrefontaine pour atteindre Vielsalm. Les paysages sont par ici de toute beauté. Ils se partagent entre forêts et rochers. En arrivant dans la petite ville, n’oubliez pas de noter dans vos agendas le prochain Sabbat des Macralles, le 20 juillet dès 19h30. Les sorcières prennent possession de la ville. En attendant nous irons reprendre des forces dans un bien bel endroit (voir carnet).

Cousins Germains

Repus, nous quittons Vielsalm par une route tournicotante à souhait. Nous arrivons dans les cantons de l’Est, qui constituent la Belgique germanophone. On ressent rapidement l’empreinte de l’esprit germanique. Comme si tout ce qui compose les villages se trouvait soigneusement rangé. Vous avez dit «Ordnung»? Même la nature semble s’être mise au diapason. Une forme d’harmonie se dégage des contrées que nous traversons.  Il est clair que la propreté et l’entretien soigné des lieux participent à cet agréable sentiment. Les autres régions de ce qu’il reste de la Belgique devraient peut-être s’inspirer de ce modèle… Mais trêve de considérations politico-communautaires, profitons des lieux et des splendides routes qui nous attendent. La moto confère un sentiment de liberté qui est exacerbé dans une région comme celle-ci. Une courte enjambée de la N62, à présent, avant de prendre la direction de l’est et de s’enfoncer plus encore en «Germanie» Lors de ce repérage, quelques traces de neige trainaient encore sur le bas-côté de certaines routes. C’est vous dire la rigueur du climat en ce coin reculé de Belgique. Après le hameau de Bracht, nous entrons dans Burg Reuland. La commune abrite les ruines d’un château («Burg») construit à la fin du XVIe siècle. 

Le silence est d’… Our

En quittant le village, on enquille la splendide vallée de l’Our (Ourtal). Tantôt encaissée, tantôt plus large, cette vallée est l’un des plus beaux coins à parcourir à moto de toute la Belgique. Les virolos s’enchainent sans fin, le revêtement est de bonne qualité, ce tracé possède un vrai goût de bonheur motocycliste. On en redemande! Les villages aussi vous dépayseront. Les maisons aux murs épais, aux fenêtres basses, s’accrochent aux rives de la rivière. Vous l’aurez compris, nous sommes tombés sous le charme de ce coin. L’Our prend sa source dans les Hautes Fagnes. Elle forme la frontière avec l’Allemagne puis entre le Grand-Duché et l’Allemagne. Son cours dévale jusqu’à la Sûre sur un peu plus de 78km. Peu après le village d’Ouren, nous arrivons aux trois frontières. Nous découvrons un monument érigé en 1977 appelant à l’amitié et à la coopération des citoyens européens. La stèle principale reprend les noms des 12 signataires du Traité de Rome le 25 mars 1957 qui a jeté les bases de l’Union européenne. A l’époque ce n’étaient que 6 pays. Si l’idée de base peut s’apparenter à une révolution économique, actuellement l’écart qui existe entre les instances dirigeantes et les réalités quotidiennes des citoyens s’apparente à un gouffre. Quelques mètres après le monument, nous quittons le territoire belge pour entrer au Grand-Duché.

La route reste splendide. 

Nous traversons le village de Lieler, jetez un œil à l’église, toute blanche, dont le chœur remonte au XIVe siècle. Lieler abrite également une grotte artificielle. De petite taille, elle fut construite en 1955 par tous les habitants du village qui avaient fait vœu à la sainte Vierge durant la guerre de lui rendre hommage pour sa protection pendant le conflit. On rejoint alors la Nationale 7. Eh oui, on en trouve aussi une au Grand-Duché! Nous l’empruntons sur un peu moins de 500m avant d’entamer notre dernière boucle vers Clervaux. Notre itinéraire prend fin au pied du château féodal du XIIe siècle qui domine toute la ville. Appartenant à l’Etat, il fut autrefois la propriété de différentes familles nobles et de chevaliers. Au cours de l’offensive  des Ardennes, il fut bombardé par les troupes allemandes. Restauré après la guerre, il abrite, entre autres, la collection complète des photographies «Family of Man». Cette collection de 503 photos de différents photographes (dont Robert Capa, Cartier-Bresson ou Robert Doisneau), rassemblée par Edward Steichen, photographe américain d’origine luxembourgeoise, a pour but d’expliquer l’homme à l’homme à travers la photo. A découvrir avant de rentrer très agréablement en direction de Bastogne où l’on retrouve la N4, toujours en aussi piètre état. Bonne route et prudence!

Arrêts gourmands

– Liège: au petit matin, nous avons profité du «Bus Taverne». En semaine, il accueille les usagers des transports en commun. Un bistro sympa avant de démarrer la route. Bus Taverne, 2 rue Souverain-Pont à 4000 Liège. Tél.: 04/221.16.63.

– Vielsalm: Le restaurant «Les Comtes de la Salm» occupe le site du premier château des comtes de Salm. L’intérieur est particulièrement accueillant, partagé entre pierre de pays et longue poutres en bois. La grande salle est dotée de nombreuses alcôves sympathiques pour les motards en couple. La truite du Val de Salm et l’entrecôte du pays ont ravi nos papilles. Le week-end, il est préférable de réserver. Les Comtes de la Salm, 6 rue J. Bertholet à 6690 Vielsam. Tél.: 080/21.62.36.

– Clervaux: la Taverne des Sports nous a permis de boire le verre de l’amitié avant de regagner nos pénates. Par beau temps, une petite terrasse permet de profiter du soleil. Café-Taverne des Sports, 26 Grand-Rue à L-9710 Clervaux. Tél.: +352/26.91.07.69.